Le gouvernement hova, un simple pantin


Une Inde africaine pour l'Angleterre. Cela signifie pour l'Auteur anonyme de la brochure américaine publiée en 1883 et relative à Madagascar, le monopole exclusif du commerce dans la Grande île par les Anglais. Plus exactement, « comme au temps de la Compagnie des Indes orientales, seuls les bateaux battant pavillon anglais seront autorisés à commercer sur les côtes malgaches ». Robinson, consul des États-Unis à Toamasina, signe alors un traité de commerce avec le gouvernement merina, même si « les anglophobes extrémistes auraient souhaité qu'il assure dans l'île l'équilibre des forces entre les Français et les Anglais ». L'Auteur aborde alors le cas du débarquement d'une cargaison d'armes destinées au gouvernement merina. L'agent britannique assure à Robinson que Le Timbre, commandant de la Station navale française de la mer des Indes, s'oppose au débarquement de ces armes. Ce que confirme la lettre en date du 18 juillet 1882, des autorités françaises. Pourtant d'après l'Auteur, Robinson n'aurait pas dû donner foi à cet avertissement et prendre toutes les mesures qu'il considère nécessaires pour protéger les droits d'un navire américain, en l'occurrence le « Stilhuan B. Allen ». « Depuis, l'expérience lui a appris qu'il n'était pas sûr, dans les affaires de Madagascar, d'avoir une trop grande confiance dans les dires des agents anglais ou des fonctionnaires hova.» C'est d'autant plus vexant pour l'Auteur que les journaux anglais n'hésitent pas «à représenter d'une manière sarcastique notre consul Robinson». Surtout que celui-ci « occupe une position sans dignité dans la suite des ambassadeurs malgaches » envoyés par la reine en Europe et aux États-Unis. Concernant le meurtre en septembre 1882 de « deux Américains et d'un Français »- en fait seuls Emerson et Théodore Parent sont tués, Hulett ayant pu s'enfuir- l'Auteur affirme que cela montre avec évidence « l'esprit bien connu manifesté par les Anglais dans toutes les choses coloniales ». Il cite alors le « London Times » qui, à la nouvelle de ces meurtres, en parle comme ayant été commis « sur deux Anglais ». L'Auteur explique que cette attitude démontre que les Anglais croient « qu'ils sont les seuls autorisés à voyager dans les colonies » et que l'article admet involontairement les dangers dont sont menacés les étrangers de la Grande île, « par la faute des récentes intrigues du vice-amiral Gore-Jone ». Il précise que l'envoyé spécial britannique incite le gouvernement merina, « avec l'aide et l'amitié de l'Angleterre » à recommencer « ses attaques contre les droits historiques et indéniables de la France sur certaines parties de Madagascar ». Pour l'Auteur, le nœud de la question de Madagascar est à trouver dans le souhait des Anglais de voir Ranavalona II comme « la souveraine de fait de toute l'île, comme elle l'est déjà en droit ». Ce qui prouve qu'ils reconnaissent « que le gouvernement hova n'étend pas son autorité sur le pays tout entier » et qu'ils poussent les États-Unis « à reconnaître une souveraineté inexistante ». Ce qui, selon lui, aiderait considérablement les Anglais et augmenterait leurs facilités commerciales, « depuis qu'ils exercent, derrière le paravent de la Cour d'Antananarivo, le seul et réel pouvoir ». Aussi conclut-il: « Le gouvernement américain ne se laissera pas entraîner dans une querelle avec la France pour le plaisir d'aider les Hova qui sont de simples pantins dans les mains britanniques, et de concourir à priver les Français de leurs droits séculaires et maintes fois reconnus à Madagascar. La cause du progrès et de la civilisation ne bénéficierait en rien d'une conduite ingrate et peu judicieuse de notre part envers d'anciens alliés qui nous offrent les mêmes privilèges juridiques et commerciaux que ceux dont jouissent leurs propres colons dans l'île africaine. » L'Auteur cite comme autre argument les intérêts religieux « mis en danger par le développement de la souveraineté hova » qui gêne les missionnaires américains. L'île est, d'après lui, monopolisée par les « Mpitandrina » (pasteurs) qui sont « de simples agents de l'État » payés par le gouvernement. « Le Premier ministre est le chef suprême de l'Église. Non seulement, il s'est rendu indépendant des missionnaires protestants, mais il les a aussi réduits à n'être que de simples serviteurs et des outils de l'Église d'État, et leur soumission est la condition non seulement de leur succès, mais aussi de leur existence dans l'île. »
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