Antsirabe à travers ses armes et sa devise


Capitale du Vakinankaratra, située à quelque 170km d’Antsirabe, soit trois heures en autorail sur la ligne Tananarive-Antsirabe, la ville d’Eaux, dans les dernières années de la colonisation et les premières années de l’Indépendance, est le « lieu de prédilection de tous ceux qui, dans la Grande ile, ont besoin de délassement, de détente et de repos », affirment certains historiens et scientifiques. D’autres soutiennent que le nom d’Antsirabe signifie « la santé retrouvée pour les malades et les anémiés, les plaisirs variés de toutes les gammes des sports de plein air, les émotions plus rares et sans cesse renouvelées de ses sites touristiques ». Bref, « c’est pour tous la joie de vivre dans un climat idéalement tempéré et la claire lumière d’un ciel toujours pur » (lire précédentes Notes). Les armes de la ville s’expliquent ainsi : les quatre tours rappellent le rattachement à la province capitale tandis que la tête de bœuf est empruntée aux armes d’Antananarivo ; le rouge est la couleur de Madagascar ; la barre s’orne, au centre de l’écu, d’un diamant jetant des feux, c’est la goutte d’eau qui scintille, symbole à la fois des richesses thermales et de la situation privilégiée de la ville. Enfin, les lames d’argent sur fond d’azur rappellent les eaux du Vakinankaratra : eaux thermales, eaux de table, les lacs et les rivières. Quant à la devise, « Rano masina, Rano manoro » ou « Eau sacrée, Eau de bonheurs », elle est empruntée au vieux malgache. Dans certaines cérémonies familiales ou de fokonolona, les femmes reçoivent l’ordre d’aller chercher de l’eau à la source. Comme elles reviennent lourdement chargées avec leurs jarres, des inconnus les interpellent, ironisant sur ce travail auquel elles ne sont tenues que par leur seul sentiment du devoir. Elles rétorquent alors « Ranomasina, Ranomanara », tout en poursuivant leur chemin avec leur précieux fardeau. Outre la description de la ville digne d’un dépliant publicitaire, la richesse du pays environnant, les qualités remarquables de ses habitants attirent l’installation à Antsirabe d’un certain nombre d’industries importantes : des rizeries, des briqueteries, des usines de conserves alimentaires, des entreprises de construction et d’ameublement, une manufacture de tabacs, la plus grande de l’ile, et une autre de cigarettes est en cours d’établissement en 1955. Au début des années 50, trois nouvelles usines s’ouvrent, une huilerie pour traiter l’aleurite et l’arachide, une brasserie des plus modernes, et une société cotonnière qui « retentit dans ses immenses bâtiments du bruit de ses deux cents métiers à tisser ». Dans son sous-sol, la région du Vakinankaratra recèle des richesses latentes considérables et voit fonctionner la première laverie d’uranium de la France d’Outre-mer. Parallèlement, ses eaux minérales et thermales sont renommées et lui donnent le nom « Le Vichy malgache ». « Les eaux des sources Cristal et Visy Kely se boivent à toutes les tables de la Grande ile. » Le charme d’Antsirabe se voit également à travers ses ombrages et ses parcs, ses pelouses et ses fleurs, ses lacs, ses différentes installations sportives, ses rivières et les truites de ses torrents. « En fait, la ville est une véritable cité-jardin. » Dans le même jardin, «croissent le chêne et le latanier, fleurissent la violette et la liane aurore, mûrissent la pêche et la goyave ». Ses avenues sont ombragées de filaos et de platanes. Près de Ranovisy, se marient aux mimosas et aux eucalyptus des peupliers d’Italie, « presque aussi beaux que ceux du quai Bourbon », et des saules semblables à ceux qui, « au Parc d’Ermonville, inclinent leurs feuillages éplorés sur la tombe de Jean Jacques ». De véritables pinèdes donnent « leur cachet particulier » au Parc de l’Est, au Bois Madame, à l’Arboretum, à l’Ivohitra et aux abords du lac Andraikiba. Tous ces arbres assurent en permanence un air riche en oxygène naissant et en principe balsamique. En guise de conclusion, citons le chroniqueur du Bulletin de Madagascar d’octobre 1955 : « C’est pourquoi Antsirabe, station thermale, centre touristique et ville climatique, a été appelée, à juste titre, la Perle de l’océan Indien et pourrait prendre pour devise, en s’inspirant des vers du poète de l’Invitation au voyage : Ici tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et tranquillité. » Texte : Pela Ravalitera - Photo : madablason by Aiky
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