Un rocher s’écroule


Un monument. C’est en un mot le qualificatif approprié à TsilavinaRalaindimby décédé hier à l’âge de 72 ans. Une personnalité hors du commun comme il en existe rarement. Raintsi c’était un professionnalisme reconnu à l’unanimité, une compétence recherchée, une carrière exceptionnelle embrassée avec passion et engagement, axée sur le sport, la culture, le journalisme, la communication et la politique, un patriotisme inaltérable, un soif de partage sans pareil, une modestie et une humilité légendaires. Les nombreux témoignages et les hommages rendus sur les réseaux sociaux prouvent bien que les superlatifs ne sont pas exagérés à l’endroit de celui qui avait présenté le journal télévisé de la TVM dans un malgache pur et impeccable avec une maîtrise et éloquence incomparable bien avant PPDA, un moment immanquable à l’époque. Oui Raintsi était un fervent défenseur de la langue maternelle plutôt par l’acte que par les discours. Son journal était un régal pour les puristes, un récital pour les profanes dans lequel la culture la disputait à la passion, les mots avaient un poids, les phrases un sens. On lui doit le mot serasera avec lequel il baptisa son département ministériel où avec la regrettée Gisèle Rabesahala, il était le seul ministre bien à sa place. Raintsi était d’ailleurs un professionnel comme pas deux dans le journalisme intransigeant sur son indépendance. C’est ainsi qu’il avait claqué la porte à la TVM de but en blanc lorsqu’on le pouvoir révolutionnaire voulait lui donner des ordres. Un départ sur un coup de tête sans penser au lendemain. Mais la panoplie de Raintsi était telle que sa reconversion était une simple formalité, que c’était reculer pour mieux sauter. Celui qui avait fait les premiers reportages télévisés de rallye, le premier reportage sur le groupe Mahaleo en 1972, le parolier du groupe HazomidorobokaAmpamarinana, du tube Ramanobegalona de Lolo synytariny, du promoteur de plusieurs artistes à l’échelle internationale. Des actes illustrants son patriotisme ou nationalisme prolétarien. Aussi bien le groupe Mahaleo que HazoMidorobokareflétaient l’aspiration populaire de cette époque. Il va continuer son engagement politique avec le mouvement Maha olona sous la bannière duquel Dama était élu député en 1993. Raintsi était également un des artisans des succès des 3 emes Jeux des îles 1990 et des 3 emes Jeux de la Francophonie en 1997, dont il était le chef du département communication, avec son ami Solo Rajaonarivelo qui l’a précédé il y a quatre ans. Le pays pleure véritablement un de ses illustres fils prodiges. Raintsi était dans ses domaines ce que Rado et Ratsimamanga étaient dans les leurs, un génie. Chantre des idées, source intarissable d’imagination, bastion de la création, pape de l’innovation, Raintsi avait toujours la fraîcheur de ses 18 ans dans sa façon de penser. Ce qui explique sa facilité de contact avec la nouvelle génération qui reconnaît son apport inestimable. Raintsi était un contemporain de toutes les époques. Autant son physique ne faisait pas son âge, il n’avait d’ailleurs pas de cheveux blancs avec sa boule à zéro, autant il savait conjuguer le passé décomposé au présent de l’indicatif pour un futur très simple. Oui, là c’est vraiment un rocher qui s’écroule.   Comme il habite à Amboninampamarinana, le rapprochement avec l’actualité et la métaphore en rapport avec son gabarit ne lui auraient pas déplu. Par Sylvain Ranjalahy
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