Du bon discours non appliqué


Le 25 janvier 2014, à la cérémonie d'investiture du cinquième Président de la République, Hery Rajaonari­mampianina s'est présenté comme le Président de tous les Malgaches en ces termes: « Aujourd'hui, je vous demande à vous ma famille politique de m'aider pour favoriser le grand destin d'unité nationale qui est le mien. Je vous demande à vous mes amis de me laisser libre. Libre d'aller vers les autres. Libre d'aller vers celui qui n'a jamais été mon ami, qui n'a jamais appartenu à notre famille politique, et parfois même qui nous a combattus. » À ses amis, le nouveau Président a lancé un appel de soutien de l'aider à écouter les 49% des électeurs qui se sont abstenus et les 47,5% qui n'ont pas voté pour lui. Quatre ans après ce discours prometteur, on attendait la fin de la crise de 2009, le renforce­ment de la cohésion sociale, l'apaisement politique, la guérison des malaises au sein des Forces armées, le retour aux jeux démo­cratiques entre le pouvoir et l'opposition. On espérait que les conditions de vie allaient changer avec la relance de l'économie et de l'emploi entraînant le redressement de la vie des Malgaches particulièrement des plus vulnérables. Mais force est de reconnaître que le discours du Président n'a pas été traduit en actions. La page des conflits de 2009 est loin d'être tournée. Au contraire, de nouvelles blessures apparaissent alors que les blessures anciennes ne sont pas guéries. Les conflits de 2009, jadis entre Andry Rajoelina et Marc Ravalomanana sont étendus à présent à plusieurs autres acteurs. Quant au souhait des amis du Président de l'aider à écouter les 72% des Malgaches qui se sont abstenus et n'ont pas voté pour lui, il ne s'est pas réalisé. En réalité, les posi­tions des uns et des autres ainsi que celle de la majorité silencieuse se durcissent de plus en plus. Ceci explique sans doute, la préparation à la fois floue et laborieuse de l'élection de 2018 qui révèle des signes de blocage important d'origine politique. Malgré la reconnaissance internationale obtenue après l'élection de sortie de crise, la vie quotidienne des Malgaches n'a pas changé. Au contraire, la précarité, la pauvreté, l'insécurité, le chômage, la corruption, la faillite de l'État de droit, le relâchement général des services publics, tous ces indicateurs sont au rouge. La flambée des prix des denrées alimentaires n'a jamais atteint le niveau actuel. On ne peut pas d'un côté mobiliser des ressources extérieures pour la relance de l'économie et de l'autre côté gaspiller des ressources intérieures à cause de la mauvaise gouvernance et de l'arrivée des investisseurs mafieux. Nous en sommes là. Tant que la loi du plus fort et d'exclusion continue à ériger des murs de séparation, l'unité nationale reste fragile. Les calculs politiques sont néfastes quand ils ne correspondent ni à l'intérêt de la majorité des Malgaches, ni aux valeurs de la République. Madagascar est aujourd'hui menacé de retomber dans de nouvelles crises. Soyons vigilants. Le temps est venu de commencer à construire ensemble la refondation de la Nation et de la République. Par André Rasolo
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