Les Sakalava à l’assaut de la côte d’Afrique


Sur la côte Nord du Mozambique, entre le cap Delgado et la baie de Pemba ou Porte Amelia, se situe l’archipel des îles Querimba. Ces îles basses faites de corail et sur lesquelles on trouve de l’eau potable, constituent des lieux privilégiés pour les pêcheurs et les navigateurs malgré la pauvreté des ressources naturelles. D’après Fernando Amaro Monteiro et Pierre Vérin de l’Association malgache d’archéologie, les Islamisés recherchent en particulier, et pour des raisons de sécurité, ce type de site où ils se sentent mieux à l’abri des incursions venues du continent, Arimba. « Aussi n’est-il pas surprenant qu’Ibo et ses voisines aient été touchées par l’expansion de la civilisation swahilie. » Selon le Fr Joao de Santos, « l’île de Matemo possédait une ville maure que les Portugais détruisirent ». Ces derniers viennent très tôt aux îles Querimba. Vasco de Gama, durant son voyage de découverte, fait punir « le pilote félon » sur l’île d’Açoutadi ou Kisiwa. À la fin du XVIe siècle, les Portugais sont solidement installés dans l’archipel « et l’on retrouve encore des vestiges de leur présence, notamment la forteresse de Kisiwa et l’église Nossa Senhoira de Rosario de la Grande Querimba construite en 1580. Fin XVIIe siècle-début XVIIIe siècle, ces lieux ont à souffrir des attaques des gens d’Oman. Fin XVIIIe siècle-début XIXe siècle, les incursions sakalava venues de Madagascar ou Bukini se multiplient. La plus grave a lieu en 1808. Boteler écrit à ce sujet. « L’établissement de Oibo a été attaqué, par trois fois différentes pendant les quarante dernières années, par des indigènes guerriers de Madagascar très probablement poussés par les Arabes de Bembetooka (Bombetoka), puisque le quartier général, avant l’embarquement, se trouvait dans ce port. Leurs dernières invasions se terminèrent en 1816 ; et si les éléments ne leur avaient pas été contraires pendant leur voyage, en réduisant le nombre de leurs pirogues de 250 à 68, Oibo avec ses forts aurait probablement à cette époque, formé un autre exemplaire de la série de ruines dont les Portugais ont parsemé les côtes. L’ennemi débarqua sur les îles voisines de Querimba ; démoralisés par leurs pertes, ils furent facilement mis en déroute par les troupes que le gouvernement lança contre eux : 25 de leurs pirogues furent détruites, les autres s’échappèrent vers le large, mais on n’a jamais su si elles étaient par la suite arrivées à bon port. » D’après Amaro Monteiro, il est probable que certains des « Arabes » qui viennent s’approvisionner en esclaves aux îles Querimba, figurent parmi les indicateurs des agresseurs sakalava. D’ailleurs, ces derniers, de toute évidence, bivouaquent quelque temps en certains points de la côte d’Afrique, puisque des tombes sakalava sont retrouvées au Cap Suafo, près de la frontière tanzanienne. De cette période d’incursions sakalava, subsiste le fort Saint Jean-Baptiste, dont « le plan affecte une forme d’étoiles à cinq branches », construit en 1791 et devenu au XXe siècle une prison. La prospérité des commerçants islamisés d’Ibo, qui est liée à certaines époques au commerce d’esclaves, survit à ces incursions sakalava. En effet, les Querimba restent longtemps un lieu clandestin de traite où s’approvisionnent les négriers de Bourbon et les « Arabes » du Nord-ouest de Madagascar et des Comores. Et surtout Ibo, comme le reste de l’archipel, demeure un bastion de la présence portugaise à une époque où d’autres régions du Mozambique traversent des heures sombres. De cette période datent les fortins de San Antonio, édifié en 1847, et de San José destinés à protéger les habitants contre des agressions venues de la terre ferme. San Antonio est composé d’une enceinte carrée possédant à chaque coin une guérite circulaire de guet et d’un donjon carré. San José s’est, en revanche, considérablement modifié et n’a plus au XXe siècle qu’une tour centrale, mais deux guérites circulaires de guet subsistent aux extrémités du mur. « Ce détail donne à penser que San José a dû être originellement assez similaire à San Antonio. »
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