Mais, que voulons-nous pour ce pays !?


La marche des enseignants en grève ponctue quoti­dien­nement la circulation entre Antanimbarinandriana et Ampefiloha, siège du Ministère de l’Éducation nationale. La légitimité des revendications d’un meilleur traitement salarial n’empêche pas de se poser des questions fondamentales, surtout touchant à l’éducation, pilier s’il en est de l’avenir d’une nation. Une première question se posera chaque fois qu’une grève des enseignants est déclenchée : que vont devenir les élèves ? Parents et élèves s’inquiètent, à juste titre, du non-achèvement du programme scolaire. Les élèves en classe d’examen, surtout le baccalauréat, craignent pour la tenue normale de cette échéance cruciale, sanctionnant douze longues années d’études et sésame indispensable à la suite universitaire. Une deuxième question concerne la priorité que l’État malgache n’a jamais accordée au budget de l’Éducation. C’est bien par manque d’argent public que les parents ont dû «inventer» les «maîtres FRAM» qu’ils avaient commencé par rémunérer moitié en vivres moitié en argent avant que l’État, mis devant le fait accompli, ne cherche à accompagner le mouvement en instituant des indemnités. Or, on le sait, ces «maîtres FRAM» sont peu qualifiés sur le plan académique. De surcroît, ils n’ont reçu aucun bagage pédagogique du type dispensé dans les écoles normales, ces «écoles des maîtres». Choix dramatique que celui des régimes successifs d’avoir officialisé la démarche FRAM, confiant, ou plutôt abandonnant, l’instruction des enfants et donc l’avenir de la nation à des enseignants qui ne peuvent rien enseigner faute pour eux-mêmes de savoir. Choix cynique également quand on sait que les «maîtres FRAM» sévissent uniquement dans les écoles primaires publiques : chacun des dirigeants successifs a bien compris la situattion, s’abstenant soigneusement d’inscrire ses enfants à l’école publique. Quand, sur le site web, du Ministère de l’Éducation on peut lire un communiqué extatique quant au recrutement massif de plusieurs milliers de «maîtres FRAM», on se demande ce que les dirigeants veulent vraiment pour ce pays. «Confiez-moi l’instruction publique pendant un siècle, et je changerai le monde» : qu’importe finalement la paternité de cette déclamation, puisque sa seule vérité vraie nous interpellera de tous temps. Écoles publiques dans un état lamentable, «maîtres FRAM», programme scolaire à l’avenant : on ferait exprès de saboter l’avenir de la nation qu’on ne s’y prendrait pas mieux. Le recrutement dans la Fonction publique de ces «maîtres FRAM» nous est présenté comme un accomplissement légitime. Mais, la Fonction publique ne doit pas non plus devenir un refuge de cas sociaux ! On ne va pas fonctionnariser toutes les veuves et tous les orphelins des «martyrs» tombés sur le champ de bataille des «luttes populaires» de 1972, 1991, 2002, 2009, voire 2018. La Fonction publique, que ce soit à l’éducation nationale, aux finances, dans la magistrature, etc., ne devrait accueillir que les meilleurs des enfants de la nation plutôt que de servir d’asile à tous les incapables dûment recommandés par «tonton» et «tatie». Nous sommes devant une «FRAM-isation», non seulement de l’éducation, au-delà de l’administration, mais déjà de toute la vie nationale.
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