De Lahindefona à Miaramila avec des grades


Pour mieux marquer le recouvrement de l’Indé­pendance nationale, Madagascar fonde, le 26 juin 1960, son Armée anéantie avec sa souveraineté en 1895. La Défense nationale, autrement appelée Forces armées, sont toujours assurées par les Miaramila, soldats ou membres des troupes. Sous Andrianampoinimerina, c’est tout juste s’ils ont un nom, les « Lahindefona » ou hommes à sagaie. Une fois la guerre finie, ils rentrent chez eux. C’est sous son fils et successeur, Radama Ier, qu’est entamée la véritable organisation des corps de troupes qui, à partir de cette époque, prennent le nom de «Sorindany», puis celui de «Miaramila ». Le jeune roi commence par recruter, outre les simples soldats enrôlés comme au temps de son père, cent hommes pris parmi la classe riche qu’il fait instruire sérieusement et pour lesquels il crée les grades : un général chef des troupes, 10 honneurs, qui a sous ses ordres des officiers supérieurs (de 9, 8 et 7 honneurs). Le 6 honneurs est le chef d’une centurie et a sous ses ordres un 5 honneurs et cinq 3 honneurs qui commandent, chacun à leur tour, vingt hommes. Ce sont ces sept officiers qu’on appelle « Fito lahy miandry zato » (sept hommes commandant cent). Les mille premiers soldats instruits font leurs premières armes à Maharivo. « Malgré un assez grand nombre de morts, du fait de la faim, ils méritèrent bien de leur roi » (Rajemisa- Raolison, Dictionnaire géographique et historique de Madagascar ). Une fois rentré, Radama, encouragé par l’essai, instruit treize milliers de nouvelles recrues qu’il prend dans les six territoires de l’Imerina, à l’exemple du Vakinankaratra. Il les fait instruire à Sahafa par les Anglais Brady et Caren et le Français Robin. En même temps, il fait traduire en malgache les grades militaires européens pour s’appliquer aux Miaramila. Ainsi le 2e classe équivaut à un honneur ; caporal pour 2 honneurs ; sergent (sahazana) pour sergent ; adjudant pour 4 honneurs qui est chargé de l’alignement et du port du drapeau ; lieutenant pour 5 honneurs ; capitaine pour 6 honneurs ; commandant pour 7 honneurs ; lieutenant-colonel pour 8 honneurs ; colonel pour 9 honneurs ; général de brigade pour 10 honneurs ; général de division pour 11 honneurs ; maréchal pour 12 honneurs. Radama aime ses soldats, et surtout compte sur eux. Il les qualifie de « Tandroky ny Fanjakana » (les cornes du royaume), « Hidy sy rakotry ny tany ») (cornes protectrices et couvercle du territoire), « Tandroka aron’ny vozona » (cornes protectrices du cou). Pour cette confiance qu’il met en eux, il veut qu’ils fassent le serment d’en être dignes. Ainsi à Sahafa même, au cours d’une cérémonie solennelle, les soldats promettent tous de ne jamais reculer et que « celui qui tournerait le dos à l’ennemi, qu’il périsse par le feu ». Par la suite, on constatera que ce serment ne reste ni lettre morte ni vaine parole. Lors de l’expédition dans le Sihanaka, quelques hommes dont le général lui-même, Andrian­kotonavalona, ayant simulé un repli- mais qui n’est pas jugé stratégique- devant un ennemi qui a l’avantage du nombre, sont brûlés vifs. Radama songe, de jour en jour, à perfectionner son armée jusqu’aux plus minimes détails extérieurs. C’est ainsi qu’en 1823, après la deuxième expédition dans le Menabe, il donne ordre que tous les soldats se fassent couper les cheveux car, à l’époque, les hommes ont la chevelure aussi longue que les femmes. Cela ne convient pas à ces dernières, habituées à voir leurs époux avec les cheveux longs. Elles tiennent une réunion à Ambatoroka et délèguent des représentantes pour protester auprès du roi. Celui-ci, loin de plier, se met en colère face à cette réaction féminine, et menace de mort les chefs de la mutinerie. La réforme militaire modifie sensiblement la société. « Les Miaramila jouissent de nouveaux privilèges dans leurs conditions de soldats » (Histoire de Madagascar, ouvrage pour les Classes terminales, 1967). Des Hova parviennent au sommet des honneurs et prennent, dans le royaume, une place importante. En revanche, les charges des civils deviennent plus lourdes. La corvée les frappe malgré leurs conditions d’hommes libres car les soldats de métier y échappent. Ce « fanompoana », dure redevance en travail, mobilise plusieurs jours par semaine, les civils au service du roi et de ses mandataires. D’autres impôts s’ajoutent à ceux du règne précédent : contribution militaire, taxes douanières frappant les consommateurs, impôt sur l’arak. « Le peuple ne participe plus directement à la défense ou aux expéditions militaires, mais il supporte par son travail les charges nouvelles de la monarchie conquérante. »
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