Présidentielle aux Maldives - Sous la plage, la répression


Les Maldives évoquent plages paradisiaques dans l’imaginaire du grand public. La situation politique de cet archipel, qui tient demain sa présidentielle, est moins souriante. Homme fort de l'archipel d'un millier d'îles coralliennes aux plus de 340 000 habitants, selon le dernier recensement de 2014, le chef de l'État Abdulla Yameen mène une répression féroce de toute dissidence et semble avoir le champ libre pour obtenir un second mandat de cinq ans. Protestations et pressions de la communauté internationales n'y ont rien fait. Les principales figures de l'opposition sont soit derrière les barreaux, soit forcées à l'exil comme l'ex-président Mohamed Nasheed. La société civile est muselée. Figure de proue de la contestation, M. Nasheed - qui avait été battu par M. Yameen en 2013 dans des circonstances controversées - a dû renoncer à la présidentielle en raison d'une condamnation judiciaire considérée par l'ONU comme politiquement motivée. En son absence, la coalition de l'opposition s'est ralliée derrière Ibrahim Mohamed Solih, un homme de 54 ans peu connu des électeurs. Or celui-ci s'est vu ignoré par les médias locaux, trop craintifs de s'attirer l'ire du pouvoir. Ligne rouge D'après Human Rights Watch, le gouvernement maldivien recourt à des décrets et «lois à la formulation vague pour faire taire la dissidence et intimider et emprisonner les critiques», dont certains ont été agressés voire tués. «La couverture de la campagne électorale est sévèrement restreinte par la loi sur la diffamation. Ce n'est pas une couverture équilibrée, mais nous n'avons pas le choix», a confié à l'AFP un journaliste local qui a souhaité conserver l'anonymat pour des raisons de sécurité. «Nous ne pouvons même pas utiliser les réseaux sociaux pour parler des politiciens de l'opposition», a expliqué ce reporter. Même publier des photos de personnes portant des T-shirts avec les visages d'opposants emprisonnés franchit la ligne rouge. Les journalistes étrangers cherchant à couvrir le scrutin ne se sont généralement pas vu accorder de visas. Seuls quelques-uns, ces derniers jours seulement, ont réussi à obtenir le sésame. L'opposition a dénoncé la semaine dernière ce blocage de la presse internationale et accusé le régime de chercher à limiter "l'observation indépendante du vote et des probables tentatives du président Yameen de le voler". La poigne de fer s'est encore durcie début 2018 lorsque le chef de l'État s'est opposé à une décision de la Cour suprême, qui cassait les condamnations judiciaires d'opposants et réinstituait dans leurs fonctions des parlementaires rebelles. Abulla Yameen avait alors imposé un état d'urgence de 45 jours, fait arrêter deux juges de la Cour suprême et l'ancien autocrate de l'archipel (1978-2008) Maumoon Abdul Gayoom - par ailleurs son demi-frère et ex-mentor. La haute instance judiciaire avait finalement dû revenir sur sa décision. © AFP
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