Loi de la jongle


Trois jours d'enfer pour les automobilistes tananariviens. Jamais de mémoire, même en période de fin d'année, la circulation n'a jamais été aussi obstruée que de jeudi à dimanche. La faute en est d'abord aux membres de la communauté des Témoins de Jehovah qui ont envahi la ville et le Coliseum Antsonjombe pendant quatre jours. L'axe Nord de la ville a été complètement paralysé depuis Analakely. Et quand une issue est bloquée et que tous les conducteurs pensent de la même façon, tout le monde se retrouve à l'issue de secours jusque-là assez dégagé mais qui allait très vite s'étouffer sous le rush. La situation se complique quand des quidams se permettent de fermer une rue en plein centre ville sans demander une autorisation de la mairie, sans aviser les usagers. Ils y effectuent des travaux de sondage pour le besoin de la construction d'un troisième tunnel, semble-t-il. Toutes les autorités ignorent de quoi il s'agit exactement. Ainsi va le pays. Chacun fait ce qui lui plaît. Déjà en temps normal, il faut avoir le talent d'un jongleur pour pouvoir se faufiler dans les rues de Tana dépourvues de tout repère permettant de respecter le code de la route. Les marquages au sol sont faits avec une peinture à l'eau et disparaissent au premier crachin. Les panneaux en fer ou en alu sont la cible préférée des vandales et sont des espèces en voie de disparition. Les ronds points sont de véritables ratières, sans signalisation ni éclairage, attendant une proie promise. Dans ce décor, il est évident que ceux qui disposent de gyrophare, de cocarde et de vitres fumées les utilisent à fond quitte à emprunter un sens unique avec l'appui de gorille qui pointent le bout de leur kalach vers ceux qui s'aventurent à boucher le passage. La police a décidé de sévir à travers un communiqué. Un courage salutaire pour tenter de remettre un peu d'ordre dans cette jungle. Le ministre de la Sécurité publique, dont on admire la volonté et l'audace, a demandé aux autorités de se soumettre aux fouilles systématiques effectuées par les agents de la circulation pour assainir le milieu mais il est évident que la mission est pour le moins difficile. La répression ne semble plus être la solution idoine avec des infrastructures qui ne sont plus adaptées aux réalités aussi bien en terme de nombre de population que de nombre de véhicules. Les efforts d'élargissement du réseau routier doivent être multipliés par dix pour pouvoir absorber l'excès d'effectif qui fait que tout le monde y va de son abus pour pouvoir s'en sortir. La panacée est à ce prix, quitte à attendre le creusement d'un tunnel. Par Sylvain Ranjalahy
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