Communauté plutôt que Fédération


Au début 1958, si les évènements graves qui se déroulent en Algérie et en France précipitent l’évolution de la situation à Madagascar (lire précédentes Notes). La chute de la IVe République résulte en France, de la crise de mai 1958. Le général de Gaulle, investi le 2 juin par l’Assemblée nationale, devient Président du Conseil et annonce aussitôt la mise en œuvre d’une nouvelle Constitution. « Elle établira un grand ensemble politique, économique et culturel dans le cadre d’une fédération » (Histoire de Madagascar pour lycéens des classes Terminales, 1967). Les auteurs de l’ouvrage poursuivent : « Ce n’est pas l’Indépendance, mais les leaders des Territoires, en particulier Houphouët Boigny, Léopold Cedar Senghor, Philibert Tsiranana, restent prudents, persuadés par ailleurs qu’ils sont sur la bonne voie. » En effet, ils possèdent une expérience parlementaire déjà longue et savent obtenir la considération et l’amitié de nombreux hommes politiques français. « C’est le vice-président du Conseil de gouvernement de Madagascar qui prononce, le premier, le mot Communauté, par lequel on remplace finalement le terme ‘Fédération’. » Leur confiance dans le nouveau chef du gouvernement français les conduit à défendre le concept de la Communauté. Le référendum du 28 septembre 1958 sera la première phase du processus d’autodétermination pour les Territoires d’Outre-mer d’appartenir ou non à la Communauté. Le général de Gaulle tient à expliquer lui-même ce processus à tous les peuples de l’Union française. Il arrive à Antananarivo, le 22 août 1958, et reçoit un accueil enthousiaste. « Solennellement, dans le cadre grandiose de Mahamasina où il l’accueille au nom du peuple malgache, le vice-président Tsiranana exprime la volonté d’accéder à l’Indépendance dans le cadre de la Communauté. » La réponse du chef du gouvernement française est forte, claire et précise : « Demain, vous serez de nouveau un État. » La fermeté du vice-président Tsiranana, l’affirmation dépourvue d’ambigüité du général de Gaulle « provoquent l’enthousiasme dans toute l’ile ». Le référendum se déroule le 28 septembre. Avec 1 361 801 oui contre 391 166 non, Madagascar choisit la Communauté. En Afrique, seule la Guinée opte pour le non. La deuxième phase de l’autodétermination consiste dans le choix du statut de l’État malgache. Le Congrès des Assemblées provinciales se réunit le 14 octobre, dans le grand amphithéâtre du lycée Gallieni. Norbert Zafimahova est élu président du Congrès par ses pairs. La proposition suivante est aussitôt mise aux voix : « Madagascar est érigé en État et cet État est une République malgache. » Le vote intervient : par 208 voix sur 234 votants, la proposition est adoptée. La République est proclamée. « Dans l’amphithéâtre, l’émotion est considérable. De nombreux témoins ont décrit l’enthousiasme des congressistes, les accolades, alors que la séance est suspendue, que tous sortent pour annoncer à la foule la bonne nouvelle! » L’improvisation du président Philibert Tsiranana est pleine d’une « simplicité qui touche tous les cœurs » : « Nous avons une belle mais lourde tâche à mener à bien maintenant, et nous la mènerons à bien nous-mêmes. » Selon les auteurs de l’ouvrage d’histoire, c’est un vibrant appel à l’Unité nationale. Le lendemain, 15 octobre, le haut-commissaire André Soucadaux déclare solennellement « la caducité de la loi dite d’annexion » du 6 aout 1896. Après avoir pris acte, au nom du gouvernement de la République française du vote du 14 octobre 1958, « la France reconnait l’institution de l’État malgache ». Le 16 octobre, nait l’Assemblée constituante dont les membres sont désignés parmi les congressistes. Au cours de la séance les couleurs du drapeau national sont arrêtées : l’association du blanc, du rouge et du vert « matérialise l’unité de la nation malgache ». Un gouvernement provisoire, avec à sa tête le président Philibert Tsiranana, assure l’exécutif du jeune État pendant que l’Assemblée nationale, sous la présidence de Norbert Zafimahova, élabore la Constitution. En janvier 1959, des protocoles d’accord mettent à la disposition de la République malgache les fonctionnaires d’autorité et les services de l’ordre public.
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