ID géniale


Terminus pour les taxi-bêtes. Il fallait y penser. Les bus seront bientôt de retour. Le concessionnaire de voitures ID Motors a montré hier à Ambohitsorohitra le spécimen des bus de cinquante places qui entreront en service dans le transport public à Antananarivo. Outre la touche de modernité du car, la grande nouveauté de ce nouvel appareil de transport sera le paiement par carte du frais des passagers. On reviendra donc à l'ancienne époque avec cette grosse nuance que le nouveau modèle ne ressemblera ni au légendaire "Mille kilos" qui prenait une journée pour relier Andohalo à Analakely, ni au monstrueux Ikarus des sociétés Fibata et Fima de cent places qui prenaient toute la largeur de la rue. Le facteur temps, la gravité de l'embouteillage avaient mis fin à l'ère des vieux bus pour faire place d'abord aux «papango», ces transports informels au début, plus chers mais plus rapides. Petit à petit, les vieilles Peugeot 404 et 504 familiales qui assuraient le service, ont disparu, au profit des mini-bus, communément appelés Buxi avant d'être rebaptisés taxi-be avec toutes les indisciplines et les bêtises qui vont avec une situation de monopole et un métier exercé par des brutes. Très vite leur nombre va augmenter, le transport public étant devenu une activité florissante dans une pauvreté chronique. Les taxis-be seront victimes de leur succès, puisque leur croissance est telle qu'ils constituent le principal facteur d’embouteillage dans la capitale. Du coup, la rapidité qui était leur atout majeur n'est plus qu'un lointain souvenir. En plus, le coût d'un trajet, boosté par le prix des carburants, est devenu rédhibitoire pour la majorité de la population. Pendant la Transition, une tentative de revenir au bus n'avait pas abouti. Les transporteurs voulaient rester à l'actuel système qui n'est pas aussi déficitaire qu'ils le laissent croire. Moins de voitures mais plus de places offertes, une meilleure qualité de service, un meilleur traitement des passages à moindre prix, voilà les avantages de ce nouveau bus. Les usagers ne demandent pas plus. Jusque là ils étaient le dindon de la farce, totalement impuissants face au diktat des transporteurs. Désormais ils n'auront plus à se plaindre d'être sur une planche, en guise de siège, de subir les odeurs «lacrymogènes» et la saleté des receveurs, d'encaisser l'insolence de «l'équipage», de se planter aux primus dès la tombée de la soirée, d'être victimes des pickpockets aux heures de pointe, le bus étant équipé de caméras de surveillance. Tant pis donc pour les taxis-be qui n'ont jamais satisfait personne et qui n'ont pas su profiter de leur position. Ravalomanana avait essayé de les discipliner en imposant une tenue appropriée et en les faisant surveiller par des scooters tout le long de leur trajet. Cela a duré un temps, mais l'indiscipline est revenue au triple galop, au lendemain du départ en exil de l'ancien président. La gabegie du transport public est une des tares  laissées par cinq ans de Transition marqués par le règne de l'anarchie généralisée. Un jour ou l'autre il faudrait mettre fin à cette situation comme on devrait se débarrasser des marchands de rue. Cela demande du courage mais gouverner c'est surtout savoir dire stop. Par Sylvain Ranjalahy
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