Défendre le prince Rakoto à tout prix


Après son « Esquisse pour le portrait de la reine Ranavalona Ire », Simon Ayache présente un portrait de Radama II, extrait de « The Antananarivo Annual and Madagascar Magazine » de Noël 1900, dont l’auteur présumé est Rahaniraka, le jumeau de l’historien Raombana, dont une lettre en date du 5 février 1862, accompagne le panégyrique du prince Rakoto. Simon Ayache introduit sa présentation par la tragique destinée de Radama II : « Roi souhaité pour tout un peuple, couronné triomphalement, assassiné après deux ans de règne, quel homme fut-il ? » L’auteur du portrait proposé juste avant le couronnement du prince Rakoto, semble esquisser la défense du roi contre d’éventuels reproches : « Non, ses favoris- les Menamaso- ne sont pas inquiétants ; Marie, sa concubine, a de grands mérites ; son déisme ne le conduira pas à l’intolérance, au contraire… Pour toutes ces raisons, Radama II ne mérite-t-il pas l’amitié et l’aide matérielle du gouvernement britannique ? » Ministre des Affaires étrangères de Radama II, après avoir été son précepteur avec Raombana, Rahaniraka meurt environ un an avant l’assassinat de son roi. Ne prévoyant probablement pas cette issue tragique d’un règne tant attendu, « il garda son espoir en la prospérité toute prochaine de Madagascar, nouveau jardin du Seigneur ». Radama Ier, roi de Madagascar, tourne le dos en juillet 1828, « à la grande douleur de ses sujets ». Peu après sa mort, un coup d’arrêt est porté à l’œuvre missionnaire en plein essor et l’on voit « dépérir » les écoles et «s’interrompre» le développement du savoir « en plein essor ». Le prince Rakoto nait le 27 juin 1829. Comme « il était l’unique fils de Radama et de Ranavalo­manjaka »- une « filiation mystique » disent certains auteurs-, l’évènement est l’occasion d’une grande liesse : artilleries et mousqueteries grondent pendant trois jours consécutifs. L’auteur du portrait affirme que, porteur de tous les espoirs, le prince devient rapidement, pour les chrétiens persécutés, « le héros d’un véritable mouvement messianique ». Prophétie qui ne manque pas de s’accomplir, indique Simon Ayache. Il ne tarde pas à réaliser de grands progrès en lecture et écriture, prend plaisir à toutes sortes de travaux de forge et de charpenterie, encourage les ouvriers habiles, participe avec ses compagnons au dur labeur de la construction de routes et de ponts. « Mais, poursuit l’auteur du portrait, tout cela n’est rien comparé à la bonté de son cœur, la puissance de son génie, sa finesse, sa tolérance d’esprit. Il est l’ennemi de toutes les formes de tyrannie. Il est plein de pitié pour tous les affligés et les malheureux. » Adoré par la reine-mère, le prince Rakoto use toutefois de tous les moyens pour faire échec à ses desseins, dès qu’elle projette quelque acte de cruauté à l’encontre de ses sujets. « Si quelqu’un était condamné à mort, ou aux fers, ou à boire le tanguin, il le faisait détacher et s’enfuir, après lui avoir donné de l’argent pour le voyage. Il sauva des milliers de vies de cette façon. Ce qui lui gagna auprès de tous, un universel amour. » Pourtant, selon Raombana, le soutien du prince aux chrétiens persécutés est intermittent car au gré des influences qu’il subit. L’historien « déplore en particulier, celle de son épouse Rabodo, la future reine Rasoherina ». Dans cette œuvre d’humanité, poursuit l’auteur, il est souvent aidé de Marie, l’une de ses favorites. C’est une femme d’intelligence solide, d’esprit élevé, qui mérite hautement la confiance de son souverain par sa droiture et la noblesse de son âme, explique-t-il. « En un mot, elle est sa principale confidente ». Poursuivant son panégyrique, l’auteur du portrait précise cependant, que malgré sa bonté, sa courtoisie, son affabilité, le roi n’accorde pas « un facile crédit » à tout ce qu’on lui dit. « Il fouille jusqu’au fond des choses et sa solide intelligence, son grand génie découvrent rapidement les secrets cachés des hommes les plus intrigants et les plus fourbes. » Vis-à-vis de la foi, Radama II, indique l’auteur, est déiste et croit en un Être suprême, sans être protestant, ni catholique, ni musulman, ni païen, même s’il souhaite que toutes les religions se propagent dans son pays. D’après Rainandriamampandry, il aime déclarer à ses amis qu’il « croit en Dieu, non en ses paroles, en la Bible ».
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