conjoncture sulfureuse - Les évêques catholiques craignent le pire


Dans une déclaration faite, hier, la commission épiscopale de Justice et paix dresse un tableau sombre de la conjoncture. Elle suggère la tenue d'une table ronde entre les dirigeants et les administrés afin d'éviter un embrasement de la situation. Dialogue. Tel est le message martelé par la commission épiscopale de Justice et Paix dans sa déclaration d'hier. Après deux jours de cogitation et de débat sur la conjoncture dans le pays, les membres de cette entité au sein de l'église catholique en charge de la vigilance en matière de droits de l'homme, de justice a conclu la nécessité de tenir une « table ronde où les responsables pourront entendre les voix des administrés ». Selon la déclaration lue par Monseigneur Roger Victor Rakotondrajao, président de la commission épiscopale de Justice et paix, sur les ondes de la radio Don-Bosco, hier, cette table ronde « permettra de débattre et d'échanger sur les problèmes qui pèsent actuellement et trouver des solutions pérennes car, selon nous, c'est le seul chemin pour éviter les hostilités risquant de devenir des étincelles qui mettront le feu aux poudres ». Faisant référence à des faits d'actualité, la commission des évêques de Justice et paix dresse un portrait sinistre de la situation sécuritaire, de la justice ou encore de la gouvernance. Les attentats et les actes de banditisme à répétition, les contes­tations des exploitations minières à Bealalana et Soamahamanina, ou encore la corruption chronique au sein de l'administration publique, ainsi que, les débats sur les libertés individuelles sont brassés dans la déclaration d'hier. « La population vit dans une crainte perpétuelle car le pouvoir n'arrive pas à protéger les personnes et leurs biens (…) », est, par exemple, dit concernant la sécurité. « L'avenir s'assombrit car ce qui devrait être un lieu de vie et source de revenu et puis servir de lieu de tombe est vendu à d'autres », déplore Justice et paix, à propos des exploitations minières contestées. « À cela s'ajoute le non-respect de l'équité et l'impartialité, surtout, au niveau de la justice (…) ce qui fait que l'État de droit n'est qu'utopie. Corruption et cupidité sont reines au sein de l'administration », ajoute la déclaration. Écoute Au regard de la déclaration lue par Monseigneur Rakotondrajao, avec ces maux qui l’accablent et qui viennent s'ajouter à la dureté du quotidien des ménages, la situation sociale est au bord de la rupture. Le dialogue est, alors, proposé comme soupape pour apaiser la situation et trouver une solution acceptée par tous. « Nous vous demandons humblement de ne pas faire la sourde oreille ni de vous murer dans un excès de confiance », adresse l'organisation catholique aux tenants du pouvoir. Dans le débat sur le projet de code de la communication, Hery Rajaonari­mam- ­pianina, président de la Répu­blique, et Solonandrasana Olivier Mahafaly, Premier ministre ont ouvert la porte au dialogue, jeudi. Dans la foulée, pourtant, le texte contesté a été voté par une poignée de députés sous impulsion gouvernementale. Face aux villageois de Soamahamanina, le même jour, l'État a opposé les gaz lacrymogènes. Tout en martelant l'ouverture au dialogue, le pouvoir semble, cependant, se calfeutrer dans une logique de répression en imputant toute voix discordante d'intention politique séditieuse. Dans une interview accordée à la station RTA, un responsable du ministère auprès de la présidence en charge des Ressources stratégiques, tout en soulevant une articulation politique aux contestations de Soamahamanina a, aussi, accusé des prélats catholiques d'inciter les villageois à se soulever. En réponse, Monseigneur Rakotondrajao a déclaré à la même station que « l'église ne fait pas de la politique. (…) son objectif est la recherche du bien-être commun. Elle s'interroge sur la place de ce bien-être commun dans ce projet d'exploitation ». Dans la déclaration lue à la radio Don-Bosco, la commission épiscopale de Justice et Paix avance que la table ronde qu'elle recommande devra servir de plateforme pour la transparence de la gestion des affaires étatiques,  concernant par exemple les projets d'exploitation miniers ou encore le rétablissement de  l'impartialité au sein de la Justice. Elle souligne, aussi, la nécessité d'édu­quer la nation à la pratique d'une démocratie dans le respect des valeurs citoyennes, mais non pas « en muselant la liberté d'expression ». Garry Fabrice Ranaivoson
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