Une certaine idée en partage


De la classe. Faite d’élégance, de sobriété, de solennité. J’aime l’exercice du pouvoir, jusque dans sa passation, chez ces démocraties enracinées. L’improvisation baroque y est une faute de goût, un manque de savoir-vivre, une impolitesse. On n’y voit pas, par exemple, le ridicule suprême d’une clef géante, qu’on se passerait de main en  main, symbole physique nécessaire à des esprits limités dans leur incapacité à l’abstraction. De la légitimité aussi. Les anciens usages et les vieilles traditions ont quelque chose de rassurant. Qu’importe si le «monarque républicain», selon l’expression consacrée inventée par le juriste et professeur de droit Maurice Duverger («La Monarchie républicaine», Robert Laffont, 1974) à propos du général de Gaulle, et de ses successeurs de la Cinquième République française élus au suffrage universel direct (depuis 1962), endosse volontiers une étiquette monarchique, la République a déjà emménagé dans les palais des rois de France. Il y a des codes de langage et des rituels d’attitude qui inscrivent la sacralité du pouvoir dans un protocole lisible au commun. De la crédibilité également. On connaît ces soldats de la France, que le Président de la République nouvellement investi passe en revue, engagés dans de vraies opérations militaires avec des morts qui n’ont rien de virtuel. Une armée qu’on sait pas d’opérette (comme pourraient l’être les Gardes suisses du Vatican) ni de pacotille (comme les maigres divisions de certains pays du Tiers-monde, que je ne citerai pas, et leur régiment de généraux). Et personne n’irait se moquer de l’usage de ce camion militaire ACMAT, «véhicule léger de reconnaissance» pour un pays dont les soldats sont engagés au Sahel ou au Moyen-Orient. De même, on sait avoir affaire avec un pays industrialisé, producteur d’une valeur ajoutée que n’ont pas les économies uniquement exportatrices de matières premières sans transformation, qui laisse le choix à son Chef entre quatre marques automobiles nationales (Renault, Citroën, Peugeot, DS) pour le convoyer. Encore, personne du village planétaire n’ignore l’existence de Paris, métropole de bien de superlatifs que l’immodestie des siens proclame suffisamment souvent à la face du monde. Une «certaine idée», quelque part. «La France ne peut être la France sans grandeur», écrivait le général de Gaulle en 1954 (Mémoires de guerre, tome 1). Ses succès achevés comme ses malheurs exemplaires. La bannière étoilée des États-Unis décore chaque film de Hollywood quand elle n’est pas autodafée chez les communistes et les islamistes. La France, elle, a sa Marseillaise qui se veut l’hymne du triptyque «audace de la Liberté, exigence de l’Égalité, volonté de la Fraternité» (premier discours présidentiel d’Émmanuel Macron). On pourrait sourire de cette fatuité, mais on sait ce peuple chauvin. Et le reste du monde a appris à lui pardonner son enthousiasme à la grandiloquence. Surtout le jour où il investit l’archétype de son élite toute républicaine de forts en thème. Nasolo-Valiavo Andriamihaja
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