La folle modernité de la peine de mort


Si la peine de mort devait être une régression, que dire de la peine de prison ? Des pénitenciers entretenus aux frais du contribuable, donc à la charge de la société. La faune, qu'on y enferme, se nourrit d'amertume, de haine, de violence, ingrédients suffisants pour créer des monstres. La réinsertion sociale compromise, à quoi bon faire semblant de croire, et comment croire à la vérité d'une perpétuité incompressible au jeu des remises de peine. Comment ne pas craindre quelque évasion rocambolesque, portes ouvertes à tant et tant de récidives. Ci-dessous, trois Chroniques éparses de cette plaidoirie en faveur de la peine de mort. Morceaux choisis. (02.12.2011) INCOMPATIBILITÉ AVEC L'HUMANITÉ Un moine, d'un ordre dit des "Béatitudes", reconnaît avoir abusé, pendant vingt ans, de 57 enfants, âgés de 5 à 15 ans. Plutôt que de se concentrer sur la peine exemplaire à infliger à cet individu, on se complaît à évoquer le «procès du silence», au prétexte que sa hiérarchie avait été plusieurs fois prévenue sans jamais rien entreprendre pour y mettre fin. Ses victimes, aujourd'hui adultes, sont traumatisées à vie, tandis que le moine Albert fera cinq ans de prison. Une vingtaine de voyous, regroupés dans ce qu'ils appellent «le gang des barbares», ont enlevé, séquestré, torturé pendant trois semaines un jeune Juif, avant de le laisser pour mort, le long d'une voie ferrée. La victime décédera lors de son transfert à l'hôpital. Lors du procès, le chef du gang n'a jamais eu un mot d'excuse ou de regret, se donnant en spectacle dans les médias pour mieux amplifier ses gestes de provocation à l'égard de la Justice et de la famille de la victime. Il sera condamné à la prison à perpétuité. Anders Behring Breivik, ce Norvégien qui a tué de sang-froid 77 personnes, sera déclaré pénalement irresponsable. Il souffrirait, selon des experts mandés à son chevet, de schizophrénie paranoïaque. Selon toute vraisemblance, les droits d'un seul homme l'emportant sur ses crimes contre l'humanité, l'assassin passera le restant de ses jours dans un hôpital psychiatrique. (11.10.2012) DUALE DIGNITÉ HUMAINE Les ministres des affaires étrangères de la Suisse, de l’Allemagne, du Liechtenstein, de l’Autriche, de l’Italie et de la France, ont signé, ce 10 octobre 2012, un plaidoyer commun pour l’abolition de la peine de mort : « Aujourd'hui, 10 octobre, nous célébrons le dixième anniversaire de la journée mondiale contre la peine de mort. Cette journée mondiale représente l'occasion de réaffirmer notre opposition à la peine capitale, en toutes circonstances. Représentants de pays partageant des valeurs communes, nous devons conjuguer nos efforts et parler d'une seule voix pour que disparaisse cette pratique qui n'a pas sa place au 21ème siècle. Ces vingt dernières années, plus de 50 Etats ont tourné le dos à la peine de mort. Plus de 130 Etats l'ont abolie ou observent un moratoire. De fait, une cinquantaine d'Etats l'appliquent encore ». Parmi ces derniers, des États tout à fait respectables, comme les États-Unis ou le Japon. Car, il ne faut pas croire que l’application de la peine capitale relève uniquement de dictatures sanguinaires, de régimes islamistes sous le régime rigoriste de la charia ou de peuplades structurellement rétrogrades. À l’issue de la seconde guerre mondiale, les représentants des puissances ci-dessus signataires ont accepté, sans état d’âme, que les pires nazis soient jugés au tribunal de Nuremberg et condamnés à mort, pour nombre d’entre eux. Ils furent reconnus coupables de crimes contre l’Humanité. Dans la dignité humaine, il y a donc deux versants, complémentaires justement dans leurs contradictions, de la même Humanité : la dignité humaine des victimes qui réclament vengeance, la dignité humaine de ceux qui cherchent notre compassion malgré leurs crimes absolument odieux. Aux uns, on pourrait expliquer que la mort du bourreau ne ressusciterait pas les suppliciés. Aux autres, on pourrait exiger des garanties qu’il n’y ait plus jamais de récidive. (21.03.2016) NOTRE ÉPOQUE MARCHE SUR LA TÊTE Le 22 juillet 2011, en Norvège, le militant d’extrême-droite Anders Behring Breivik tirait froidement dans la foule de jeunes socialistes en séminaire. Condamné à 21 ans de prison, il porte aujourd’hui plainte contre l’État norvégien prétendant que ses conditions de détention sont inhumaines : l’administration pénitentiaire bloque sa correspondance avec un réseau d’extrémistes fascistes. Cet assassin de masse menace d’entamer une grève de la faim, lui qu’une société de bon sens aurait dû décapiter. On peut être sûr qu’il se trouvera des mouvements droits-de-l’hommistes pour défendre la cause de l’assassin, oubliant les 77 morts de l’île d’Utoya. Pour l’année 2015, la justice française aurait accordé 36.000 permissions, et 236 prisonniers en auraient profité pour décamper, presque une évasion par jour. Un évadé en cavale aura ainsi grièvement blessé par balle un policier de la brigade anti-criminalité. N’empêche, les idéologues de la réinsertion sociale prétendent que les permissions de sortie, la plupart du temps sans aucune escorte et jusqu’à trois jours, seraient indispensables pour aider le détenu à préparer son retour à la liberté. Ce sont les mêmes idéologues qui remettent en liberté, parfois parmi leurs anciennes victimes, de multi-récidivistes qui, bien entendu, s’empressent de violer ou de tuer, de nouveau. Le terroriste islamiste Salah Abdeslam, organisateur des tueries de novembre 2015 à Paris, qui avaient fait 130 morts, a finalement été arrêté, quatre mois après. Il vivait dans un quartier de Bruxelles archi-connu pour l’existence de mosquées fondamentalistes et désormais célèbre pour les images de femmes en voile intégral, au beau milieu de l’Europe. Les forces spéciales belges ont oublié de le tuer dans l’assaut, comme en avait eu la détermination le commando américain qui a débusqué Oussama ben Laden, commanditaire des attentats du 11 septembre 2001, qui avaient fait 3000 victimes. Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja  
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