Culture - Patrimoine - Le cœur de l’identité culturelle, blessé par la déculturation


[caption id="attachment_76100" align="alignleft" width="300"] Le palais de Manjakamiadana à réhabiliter avant juin 2020[/caption] Les vestiges du passé, les monuments historiques, les architectures, les savoirs locaux, les us et coutumes constituent les socles de l’existence d’une communauté, d’une société, d’une région ou d’un pays. Tour d’horizon de la situation actuelle de l’importance donnée aux patrimoines malgaches. Peu. La valeur accordée aux patrimoines culturels et historiques a diminué au fil des années. L’« invasion culturelle » venue de tous horizons du monde a influencé gravement la conception des Malgaches sur ce qu’ils doivent comprendre des patrimoines. Ces richesses et biens culturels hérités des ancêtres, des reines, des rois, nobles, arrière grands-parents, parents ne sont considérés comme il se doit que par une infime partie des générations actuelles. [caption id="attachment_76101" align="alignleft" width="300"] Le lac Tritriva, un des monuments historiques classés patrimoine national[/caption] Exception culturelle C’est pourquoi Hubert Rabotomanasa, directeur de la Sauvegarde et de la capitalisation du Patrimoine au ministère de la Communication et de la Culture, indique que dans la mondialisation, il y a l’exception culturelle. « Le concept de Patrimoine doit être compris comme l’ensemble de ce qui fait ce que nous sommes aujourd’hui. Connaître l’origine historique, l’ethnie, la provenance locale ou régionale des familles souches, des ancêtres, ne suffit pas comme preuve d’importance accordée aux valeurs historiques et patrimoniaux. Il est plutôt de mise de souligner que les patrimoines existent grâce à la manière de penser des Malgaches, unique au monde. Je vous citerais quelques exemples de richesses culturelles, de savoir-faire et de connaissances considérées comme des patrimoines sans pareil. Ainsi de la zone blanche de Vohipeno, dans la région Sud-ouest ou du Tranobe considéré comme tribunal populaire traditionnel respecté dans la localité. Le Fitampoha également pour l’ethnie Sakalava, vénéré en tant que patrimoine culturel de cette partie de l’île. Il existe en tout cent soixante huit monuments culturels classés dans la liste du patrimoine national dans le pays. Nous vivons dans l’ère de la mondialisation, mais il y a toujours l’exception culturelle, et c’est tout cet ensemble qui fait l’exception pour Madagascar. » [caption id="attachment_76103" align="alignright" width="300"] Hubert Rabotomanasa, directeur de la Sauvegarde et de la capitalisation du Patrimoine au ministère de la Communication et de la Culture[/caption] Liste des patrimoines -Les sites et monuments culturels -Les patrimoines immatériels (Médecine traditionnelle) -Les biens culturels Il existe cent soixante huit monuments privés et publics classés « patrimoine national » et huit sont en attente de classement. Le caractère particulier, l’histoire, l’ethnologie ou encore l’architecture en sont les critères exigés pour un classement au patrimoine national. Un titre de « patrimoine national » donne un caractère inaliénable au site ou au bien culturel. Les plus célèbres sont : -Le palais royal d’Antananarivo -La cascade de Nosy Varika -La mare aux anguilles sacrées de Vatomandry -Les montagnes de Talata-Angavo -Le point Flacourt de Fort-Dauphin -Le tombeau des pirates de l’île Sainte-Marie -Les grottes d’Andranoboka -Les souvenirs de Jean Laborde à Mantasoa -Le lac volcanique de Tritriva -Le gisement de subfossiles de Toliara [caption id="attachment_76105" align="alignleft" width="300"] Le traditionnel «Sambatra» de Mananjary est classé patrimoine immatériel national.[/caption] [caption id="attachment_76104" align="alignleft" width="300"] La ville d’Antananambony de Fianarantsoa, un patrimoine conservé.[/caption]               Déculturation [caption id="attachment_76106" align="alignleft" width="300"] La vieille ville d’Antananambony à Fianarantsoa en 1903.[/caption] L’histoire mentionne que les Malgaches ont des traces de l’Austronésie, de la Péninsule arabique, du continent africain. « On parle d’histoire, de passéisme, de combat d’arrière-garde pour définir notre identité culturelle, propre à nous. L’histoire a certes évolué, mais elle retrace aussi cette évolution de l’Homme. De son ethnie, fokon’olona comme on le définit en malgache, de sa communauté, l’Homme s’immisce, possède alors une identité culturelle », explique Hubert Rabotomanasa, directeur de la Sauvegarde et de la capitalisation du Patrimoine au ministère de la Communication et de la culture. « L’invasion culturelle des Européens, Américains, Africains et Asiatiques a pressé fort sur la culture malgache », fait savoir Andry Rasoanaivo, historien. « Explicitement, les médecines traditionnelles par exemple, considérées comme une richesse culturelle malgache prodigieuse, sont souvent diabolisées et perdent ainsi de leur valeur originelle », ajoute-t-il. «La perte de l’identité culturelle se traduit par les langues étrangères introduites à tort et à travers et qui deviennent même des langues courantes rabaissant presque la beauté de la langue malgache. Cette déculturation se reflète dans le genre de musique qui nous inonde, le style architectural moderne des maisons qui ont autrefois respecté l’orientation nord-sud avec une ouverture vers l’ouest », détaille l’historien. [caption id="attachment_76107" align="alignleft" width="300"] Jimson Ratsiaro Heritsialonina, président de la fondation Heritsialonina œuvre jour et nuit à la préservation
de la vieille ville de Fianarantsoa.[/caption] [caption id="attachment_76109" align="alignleft" width="300"] La cathédrale d’Antananambony date du XIXe siècle avec le plus beau plafond de cathédrale qui soit.[/caption]                   Antananambony, une vieille ville préservée La vieille ville de Fianarantsoa est sauvée des ruines il y a vingt ans par la fondation Heritsialonina. « La veille ville possède une valeur universelle qui fait d’elle un patrimoine unique. Un Rova y a été érigé en 1830 par la reine Ranavalona Ire et l’ensemble architectural de la ville suit la disposition architecturale d’un site royal », explique Jimson Ratsiaro Heritsialonina, premier responsable de la fondation qui porte son nom. C’est aujourd’hui le seul patrimoine architectural et historique urbain qui reste à Madagascar avec quelque 500 toits et 5 000 habitants. Il y a vingt ans, des actions de conservation ont démarré afin de rendre l’identité culturelle de l’endroit. Des bâtisses, maisons, édifices, rues et ruelles ont été réhabilités. Antananambony est une zone piétonne dont les maisons et bâtisses gardent leur implantation et leur forme architecturale d’antan. Les couleurs terre et rouge brique des maisons dominent les façades. La hauteur maximale des habitations ne dépasse pas le R+1, les toitures sont exclusivement en tuiles, les vérandas, portes et fenêtres existants n’ont pas changé. Près d’une centaine de maison ont été réhabilitées. Il est classé patrimoine national en juillet 2017. Quinze mille touristes par an visitent la vieille ville de Fianarantsoa. Des maisons d’hôtes accueillent les visiteurs. De petits métiers se sont créés afin de démontrer le savoir-faire local. Une organisation sociale bien structurée y est observée. Il est ainsi interdit d’extraire des rochers afin d’éviter les éboulements. « Il faut juste une petite dose de volonté et de prise de responsabilité pour garder et conserver les richesses culturelles. Chaque citoyen peut faire ce qu’il peut à son niveau pour faire d’un patrimoine une richesse culturelle digne de ce nom », conclut Jimson Ratsiaro Heritsialonina [caption id="attachment_76108" align="alignleft" width="300"] Les ruelles de la zone piétonne d’Antananambony
réhabilitées.[/caption] [caption id="attachment_76110" align="alignleft" width="212"] Quelques photos d’avant
et après la réhabilitation des maisons
de la vieille ville.[/caption]   Photos : Claude Rakotobe - Tojo Razafindratsimba - Fondation Heritsialonina
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