La Ouagalaise


Tout ou presque peut être transporté à moto. Vous n’imaginerez pas à quel point cette phrase peut vous surprendre jusqu’à ce que vous le voyiez par vous-même. Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso abriterait le plus grand parc de deux roues d’Afrique. Par deux roues il y a les vélos, les mobylettes et les motos. Ces derniers sont surnommés les « voitures burkinabè » dans les années 1990. En comptant qu’il y a plus de deux millions sept cent mille habitants et qu’en général une famille de cinq personnes compte près de trois moto, le calcul est vite fait. En 2015, la Direction générale des transports terrestres et maritimes (DGTTM) a dénombré pas moins de 770 000 motocyclettes. Actuel­lement, il est certain que ce chiffre a explosé pour deux raisons. Premièrement, le nombre de bolides qui ne sont pas immatriculés augmente de jour en jour. Deuxièmement, vu le manque de transport en commun et la hausse du pouvoir d’achat du burkinabè moyen, les gens optent facilement pour les deux roues. Seulement, il faut avoir les sens bien alertes, les nerfs assez calmes pour rouler à moto à Ouaga. Aux feux rouges, on compte les motos non pas par dizaine mais par trentaine, voire plus. Une fois le feu vert lancé, c’est comme si on assistait à un essaim d’abeilles prêtes pour la course et que le meilleur gagne ! Autant les motos sont nombreuses, autant les accidents peuvent se produire à tout bout de rue. Dans une journée, on compterait très facilement plus d’une cinquantaine d’accrocs à divers degrés. Certains sont vraiment graves. Mais le plus surprenant est de voir la Ouagalaise sur sa moto. Qu’elles soient bébés, jeunes ou dames, elles circulent avec tant d’aisance sur leurs scooters. Oui, on a bien dit bébé ! Il est ahurissant de voir presque des nouveau-nés accrochés sur le dos des mamans par un simple pagne se faufilant entre les voitures dans les embouteillages. Et ce n’est pas tout. La maman transporte en plus du bébé, deux à trois sacoches, les légumes sur le poignet du véhicule sans oublier son sac à main. Et il y a ces dames qui sont de nature bien dodues et fières de l’être en bonne Africaine qui se respecte. Dans leurs magnifi­ques robes pour aller à un mariage on a l’impression qu’elles volent. Tellement les robes et les dames sont grandes qu’on ne voit presque plus la moto. Mais quelle grâce, quelle élégance. Le foulard bien attaché, le visage maquillé, les chaussures au top et sans oublier le superbe sac à main, ces ladies ressemblent étrangement à des ballerines en pleine performance. Mais gare à celui qui viendra se frotter à l’une d’elles. À part la belle ouagalaise, voici une liste non exhaustive de ce qui peut se transporter très naturellement à moto à Ouaga sans que les gens soient choqués ni que le policier de la circulation vous arrête. On peut donc avoir sur sa moto une à deux bicyclettes, une autre moto, deux ou trois chèvres, un grand escabeau à sept marches, une quarantaine de poulets, un pare-brise de voiture 4*4, cinq gamins, deux femmes avec deux bébés, des portes vitrées, trois brouettes, une bonne dizaine de cagots de bières. Autres cieux, autres mœurs !
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