Une belle leçon à tirer de Rainandriamampandry


Nombreux sont les écrivains et historiens ayant rendu hommage au général Rainan­driamampandry. Parmi eux, Raymond William Rabemananjara, dans un article publié dans la revue « Madagascar océan Indien » d’avril 1990. Une grande figure de l’histoire de Madagascar qui, écrit-il, compte dans ses Annales des personnages de qualité. Le général Rainandriamampandry nait à Antananarivo en 1836 d’une famille appartenant à la caste hova des Tsimiamboholahy. Son père, Ratsimiziva, est officier du Palais (ODP) et son grand-père, Ramahery, gouverneur de Mananjary. Très jeune, il devient lui-même ODP et tient la fonction de secrétaire et, à ce titre, participe à la mission diplomatique qui se rendra en France et en Angleterre. Parallèlement, il poursuit sa carrière dans l’Administration royale, fréquente le Collège pastoral de la London Missionary Society. Plus tard, Ranavalona II et l’église protestante d’Anatirova lui affectent le diocèse de Marovatana avec siège à Ambohidratrimo. Il se distingue alors par une activité littéraire et historique d’une « rare qualité ». Poursuivant sa biographie, R.W. Rabe­mananjara parle de son entrée dans le gouvernement royal, en 1881, en tant que ministre adjoint aux Affaires étrangères (1882-1895). « À ce poste-clé à une période difficile où le colonialisme de l’Occident exerçait de vives pressions pour contraindre la Terre des Ancêtres, Tanindrazana, à la soumission, Rainandriamampandry manifesta une fermeté exemplaire. » Nommé général des forces royales, il repousse avec succès l’intervention française et gagne la bataille de Farafaty. Et l’on se souvient de sa réponse au général Miot venu lui réclamer des concessions territoriales pour démembrer la souveraineté nationale : « Vous me demandez de vous dire quelle partie de l’île je consens à vous céder ; c’est comme si vous me demandiez quelle partie de mon bras je consens à couper : je n’en veux couper aucune. Toutes me sont chères. Prenez ce que vous voudrez si vous êtes les plus forts. Quant à nous, nous n’avons rien à vous offrir ni rien à vous donner. » Puis vient la « victoire prestigieuse de l’homme de paix et de progrès sur l’esprit d’hégémonie et le mépris du droit. » Au lendemain de la défaite militaire de 1895, face à « l’armée d’invasion supérieure en armements », le gouvernement de Ranavalona III appelle Rainandria­mampandry au poste délicat de ministre de l’Intérieur. Toutefois, le 6 aout 1896, une loi française prononce l’annexion pure et simple de Madagascar comme colonie et aussitôt la « Résistance nationale et patriotique » s’organise. Cette résistance à l’occupation dure de nombreuses années. Pour y faire échec, « le général Gallieni, alors proconsul, décida de frapper haut et fort » : pour intimider la population, son idée est de faire fusiller deux personnages. Son entourage lui conseille d’abord le prince Ratsimamanga, oncle de la reine, pour mater la noblesse. Le second est longuement discuté car on hésite entre Rasanjy, ancien secrétaire du Premier ministre Rainilaiarivony, et le général Rainandriamampandry. Finalement, l’avis d’un conseiller civil l’emporte : « Rasanjy, dit-il, est un personnage sans conscience. Comme il est sensible aux honneurs et à la richesse, même pour un plat de lentilles, il vendra son pays. Il ne respecte que les forts et il exécutera toutes les mauvaises œuvres qu’on lui commandera. En résumé : sa mauvaise nature nous rendra service. » L’argumentation du conseiller se poursuit, relate R. W. Rabemananjara : « Quant à Rainandriamampandry, j’ai l’honneur de le considérer comme un ami. On ne peut pas nier que c’est incontestablement la plus belle conscience de tout le pays. Il ne compte d’autre ennemi que Rasanjy. Tout le monde le respecte. C’est un travailleur, un vrai patriote. Quand il était dans l’Enseignement, il a œuvré pour le développement des écoles à Madagascar. L’an dernier quand il était soldat, on a vu comment il s’opposa à nous à Farafaty. Aussi bien voici ma conclusion : faisons de Rasanjy le Premier ministre et fusillons Rainandriamampandry ! » Un simulacre de conseil de guerre le condamne à la peine capitale. Le verdict est préparé à l’avance. Le dimanche 11 octobre 1996, il est arrêté. Quatre jours après, il est fusillé avec le prince Ratsimamanga. « Tous les témoins de l’exécution sont unanimes à saluer le courage tranquille et la dignité de ce héros. » Texte : Pela Ravalitera - Photo : Archives personnelles
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