M. Rakotovao, M. Ntsay et la passation.


Titres étonnants : « Rakotovao, président symbolique » ou « les pouvoirs de Ntsay renforcés ». Normal lorsqu’on hait ou on adore une personne, étonnant lorsqu’on est démocrate. Comme si les pouvoirs des uns et des autres n’étaient pas régulés par la Constitution. Or il est clair : « Par suite de démission […] les fonctions du Chef de l’Etat sont exercées par le Président du Sénat » (Art.52). Et « Pendant la période allant de la constatation de la vacance à l’investiture du nouveau Président de la République […] il ne peut être fait application des articles 60 –dissolution de l’Assemblée nationale-, 100 –question de confiance-, 103 -motion de censure-, 162 -révision de la Constitution- et 163 de la Constitution » (Art.53). Il n’y a rien à inventer, il peut agir sauf les cas cités ! Il est question d’intérim car la révision de la Constitution proposée par un Premier ministre haï a été refusée par la société civile bien-pensante. Et lorsque le président de la HCC se propose d’organiser l’intérim (L’Express de Madagascar du 3 août 2018), il y a de quoi s’étonner puisque tout est prévu ! La HCC serait la régulatrice des institutions quand les démocrates croyaient que c’était le rôle des Constitutions! Mais comme le dit le président de la HCC : « je puis vous dire que si nous sommes critiqués sur le plan local, nos décisions et avis sont appréciés et respectés par nos collègues internationaux et par des personnes qui maîtrisent vraiment le sujet et la matière » (Revue Etika, N°14). Serions-nous en aristocratie (le pouvoir des meilleurs) ? C’est donc nous activistes (militants, partisans et engagés) qui ne comprenons rien. Impréparation étonnante lorsqu’aucune passation entre le président de la République démissionnaire et l’intérimaire (Chef d’Etat par intérim comme aime à s’appeler Norbert Ratsirahonana ou Président de la République par intérim) n’est prévue. Une passation veut dire au moins que le suivant sache combien de rames de papier il lui laisse, l’état des ordinateurs, les états financiers du bureau pour ne pas parler des dossiers en cours. Mais la haine domine à tel point que la bourgeoisie influente ne veut pas voir le prochain en peinture. À se demander qui va faire la passation avec le président élu le 24 janvier 2019. Si c’est l’actuel, il n’y a aura donc pas passation non plus car c’est lui-même le vainqueur ; si ce n’est pas le candidat Rajaonarimampianina, de qui le prochain recevra-t-il le pouvoir ? Mais cela est vrai, combien de fois, y-a-t-il eu passation(s) à Madagascar… Autre aspect étonnant : les deux têtes de l’exécutif sont des inconnus du grand public (Président du sénat que depuis quelques mois ou ministre d’on ne sait plus trop quels ministères depuis cinq ans puis Premier ministre depuis 4 mois), en tous les cas, qui n’ont jamais affronté le suffrage universel. Et pourtant ils vont exercer le pouvoir sur nous… Certes, en vertu de la Constitution pour le Président du Sénat et grâce à la HCC pour le Premier ministre… Point commun des trois étonnements : la démocratie est bien ignorée ! Mais comme « la démocratie a besoin de démocrates » (Friedrich Ebert), et qu’au final, il n’y en a pas un seul à Madagascar : les institutions sont manipulées, les dirigeants illégitimes, les décisions effarantes, les citoyens -dont les diplômés- démissionnaires et occupés à faire carrière. Nous sommes à un point où il est démontrable que la démocratie n’est point utile pour faire vivre les habitants d’un pays. On peut s’accommoder de tout. « Fake democracy » soutenu par la Communauté internationale dirait Bryan Klaas (enseignant-chercheur). Encore une fois, lorsqu’on raisonne au « Halako bika sy tiako tarehy », il n’y a ni énigme ni paradoxe à résoudre. par Toavina Ralambomahay Auteur de Madagascar dans une crise interminable, L’Harmattan
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