Un générique malgache à l’usage du monde


L’American School, École américaine, a organisé une journée «portes ouvertes». Depuis cette année, l’ASA a emménagé dans les anciens locaux de la Telma à Alarobia. Ceux qui avaient fréquenté les bâtiments, plus anciennement des Postes et Télécommunications, peuvent être étonnés de la métamorphose subie par les vieux murs et la belle charpente apparente à une respectable hauteur sous plafond. C’est que l’installation d’un campus estudiantin répond à des normes et à un protocole dont le non-respect expose à l’exclusion d’un réseau international. Inutile de demander au dollar près ce que cet investissement a coûté aux Américains. Le plus important est dans la volonté politique d’investir à hauteur de l’idée qu’ils se font de la grandeur de leur pays, et du rayonnement de sa Culture. L’American School, c’est un morceau d’Amérique au coeur d’Antananarivo : la conversion par l’éducation et la Culture au «rêve américain». Mais, l’Amérique n’est pas le seul pays qui fait de la «soft power» culturelle une stratégie de politique étrangère. À Madagascar, la France dispose de son réseau d’Alliance et de l’Institut Français qui avait pu porter le nom d’Albert Camus : langue française au coeur de la Francophonie ou gastronomie française au patrimoine de l’UNESCO, y sont à l’honneur. L’Allemagne continue d’entretenir le Cercle Germano-Malagasy, que les plus anciens avaient connu comme Goethe Institut. La Chine a implanté un «Institut Confucius» au sein de l’Université d’Antananarivo depuis une petite décennie. L’Espagne avait même pu compter sur un «Instituto Cervantes», mais le déficit de visibilité de l’Espagne en terre malgache lui aura été fatale, les étudiants s’immergeant en bain linguistique plutôt du côté de Cuba. Du temps de l’URSS, la diffusion de la langue russe était accompagnée de la création d’un dynamique club échéphile qui pouvait se revendiquer des noms de Karpov (Anatoli) ou Kasparov (Garry). Le concours de discours en langue japonaise est rentré dans l’agenda tananarivien avant l’apparition du festival des mangas. Et si la langue indonésienne est enseignée à leur «Gedung kebudayaan», diverses autres manifestations (Batik, Danse traditionnelle, Festival culinaire) entretiennent régulièrement les liens de part et d’autre de l’Océan Indien. Le batik indonésien, justement, est passé dans le vocabulaire international tandis que le «plus grand archipel au monde» conquiert même une capitale du village planétaire comme New York avec l’Indonesian Street Festival. Un peu comme le Nouvel An chinois (qui envahit) les rues du Treizième Arrondissement à Paris. Ou le Manga Festival japonais qui séduit jusqu’à Antananarivo. Pour l’instant, ce sont plutôt les nôtres qui s’inscrivent pour étudier la langue des autres (même un centre culturel libyen avait pu exister ici, enseignant l’arabe classique, c’est-à-dire égyptien). L’octroi des bourses d’études exporte chez nous l’attrait du pays de destination (les nombreuses bourses vers l’URSS soviétique faisaient tout de même beaucoup hésiter du temps de la CONABEX) mais importe des générations de jeunes Malgaches. Comment se retrouver «au centre de rien, mais au carrefour de tout» ? En apprenant que l’enseignement de la langue malgache est obligatoire à l’American School d’Antananarivo, je me suis mis à rêver d’un centre culturel malgache en Andafy. Tout au long des trois quarts d’heure que prend la visite du campus d’Alarobia, je me demandais quels génériques malgaches sympathiques nous pourrions bien léguer à l’Humanité, au même titre que «batik» (indonésien), «zen» (japonais), «bollywood» (indien)... Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja
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