La bibliothèque de la sagesse


Magnifique dans sa foi, sa force, son courage, son humilité» : ainsi parlait Jawaharlal Nehru (1889-1964) du Mahatma Gandhi, le père de la nation indienne moderne. Chez nous, ici à Madagascar, sans doute pourrions-nous parler ainsi du roi Andrianampoinimerina, surnommé «Ombalahibemaso», le taureau-aux-grands-yeux : «magnifique dans sa vision d’unité, admirable d’impartialité dans sa gouvernance, grand dans l’héritage politique». Oui, mais voilà, Andrianampoinimerina, c’était il y a 208 ans déjà ! Il faudrait qu’un dirigeant malgache contemporain trouve la sagesse de se hisser à la rencontre de valeurs qui nous transcenderaient tous. Notre éducation citoyenne a sans doute failli à nous donner à apprendre les exemples de figures, hommes ou femmes, qui ont su accomplir pour leur pays ce que nous attendons que fassent nos politiques pour Madagascar. Le Japon et l’Inde, hier. La Chine, aujourd’hui. Le Rwanda et l’île Maurice, demain. Là-bas, dans chacun de ces pays, il y eut des hommes et des femmes suffisamment désintéressés pour s’honorer du bonheur de leurs concitoyens. Cela ne s’est pas fait en un jour. Cela ne s’est pas fait sans souffrances, douleurs et sacrifices. Cela, surtout, s’est fait par et avec des hommes et des femmes aimant leur pays et empathiques envers leurs compatriotes. La vraie continuité de l’État est à trouver dans cette continuité vertueuse, par-delà les alternances au pouvoir. Une seule posture : servir. Une seule obsession : le pays. Et une devise : équité, mesure, intérêt général. Équité dans la considération des droits et des devoirs de chacun, mesure dans l’exercice du pouvoir et de ses privilèges, et l’intérêt général qui grandit son ministre-serviteur. Dans une stricte démarche de partage, pour essayer d’apporter le premier ouvrage à la bibliothèque de cette éducation citoyenne oubliée, j’ai retrouvé ce discours prononcé par Jawaharlal Nehru, le 14 août 1947, à la veille de la proclamation de l’indépendance de l’Inde. Nehru sera le premier Premier Ministre d’une Inde aussitôt en butte aux massacres réciproques entre hindous et musulmans. Viscéralement opposé à la partition en deux États confessionnels, l’Inde aux hindous et le Pakistan aux musulmans, le Mahatma Gandhi sera néanmoins assassiné par un nationaliste hindou, le 30 janvier 1948. Mais, son message et son enseignement vont survivre au Mahatma, «la Grande âme», tandis que le Pandit, «le Sage», allait conduire l’Inde vers un destin conforme à son histoire cinq fois millénaire. Ces surnoms honorifiques, ancrés dans la mémoire des Indiens et reconnus au sein de notre humanité, valent mieux que mille «Grand-Croix» en petit comité. (Début de citation) : «Voilà de longues années, nous avions pris rendez-vous avec le destin, et le temps est venu aujourd’hui de tenir notre engagement. (...) Lorsque minuit sonnera, tandis que le monde dormira, l’Inde s’éveillera à la vie et à la liberté (...) En cet instant solennel, il convient que nous prenions l’engagement de nous consacrer à servir l’Inde et son peuple, ainsi que la cause encore plus large de l’humanité». «Cet avenir ne sera fait ni de facilité ni de repos, mais d’efforts incessants afin de tenir les engagements que nous avons pris tant de fois. Servir l’Inde signifie servir les millions d’êtres qui souffrent. Cela signifie la fin de la pauvreté, de l’ignorance, de la maladie et de l’inégalité des chances. Le plus grand homme de notre génération (Gandhi) a eu pour ambition de sécher toutes les larmes de tous les yeux. Il est possible que cet objectif nous dépasse, mais tant qu’il y aura des larmes et de la souffrance, notre tâche ne sera pas terminée». «Un dur travail nous attend. Aucun d’entre nous ne connaîtra de repos tant que nous n’aurons pas fait du peuple de l’Inde ce que le destin voulait qu’il soit». par Nasolo-Valiavo Andriamihaja 
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