Bemiray - Voyage - Escales au pays vezo


Nous allons à la découverte des Vezo, dans ce Bemiray du jour de Tom Andriamanoro . D’un autre côté, la conjoncture politique nous amène à réfléchir sur l’affirmation de l’ancien ministre français de l’Intérieur, Charles Pasqua, selon laquelle les promesses électorales n’engagent que ceux qui y croient. [caption id="attachment_60524" align="alignright" width="300"] Les Vezo sont connus comme étant des pêcheurs chevronnés.[/caption] La population du Sud-Ouest aurait deux origines : l’Afrique toute proche, et l’intérieur du pays malgache. Les plus anciens, considérés comme « tompon-tany » ou propriétaires de la terre, furent à partir du 16e siècle assujettis par une aristocratie guerrière venue du Sud-Est et du Centre-Sud. Certains chercheurs considèrent la couche culturelle Mikea-Vezo comme le premier substrat bantou de ces grands mouvements de migration. Et si au 17e siècle, Flacourt ne mentionne pas expressément les Vezo, il parle longuement des Voroneoke dont la culture marine est pratiquement la même que celle des Vezo-Antavelo. Les Mikea d’aujourd’hui sont pour leur part des Masikoro-Vezo dont ils parlent le dialecte, et qui ont fui un contexte historique donné. Chez ce peuple de pêcheurs-nés que sont les Vezo, la chasse-collecte, ou « mihake », se pratique dans la zone des récifs. On y, cherche surtout les poulpes, ou « orita », les gonades d’oursins, ou « soke », les coquillages « tsakody », les holoturies « zanga », et les nombreux poissons de récif. La pirogue à balancier pour sa part emmène les pêcheurs loin des villages d’origine qu’ils ne revoient généralement pas avant des mois. Mais n’en déplaise aux amateurs de tableaux idylliques, il ne faut plus confondre systématiquement «Vezo » et « pêcheur vezo » : les « Vezo ampotake », ou Vezo de la boue, sont par exemple d’authentiques Vezo de l’intérieur des terres. Selon les statistiques, les Vezo sont même les plus nombreux dans la Fonction publique avec les Merina et les Betsileo. Betania, un petit village au Sud de Morondava, une existence rude et simple, vécue sous le sceau de la solidarité communautaire. Les hommes partent en haute mer à peine le soleil levé, après avoir fait glisser la pirogue sur le sable, et trouvé le bon passage entre les vagues. Un matériel, des automatismes, des enchaînements qui n’ont pas changé depuis la nuit des temps. Ne surtout rien oublier de l’hameçon bien costaud fixé à un fil de nylon lesté d’un bout de fer, du morceau de papier alu en guise de leurre, de la traîne, du filet, et du trident à planter au bon moment pour l’estocade finale. Au retour les femmes se chargeront d’écouler les prises sur le marché de Morondava ou auprès des hôtels après avoir franchi le bras de mer séparant le village de la ville. Boutre [caption id="attachment_60525" align="alignleft" width="276"] Type de goélette construite du côté de Belo-sur-mer.[/caption] Marins mais aussi charpentiers, les nomades de la mer ont aussi adopté la goélette dont la construction à Morondava comme à Belo-sur-mer requiert au moins six mois de travail. Une belle histoire qui remonte au temps de Napoléon III et de Radama II, quand une amorce de coopération technique maritime naissait entre les deux pays. Les coopérants, en l’occurrence la famille Joachim, proposaient de fabriquer des embarcations plus grandes et plus rapides. Ils trouvèrent une oreille attentive auprès de ces charpentiers habiles qu’étaient les Vezo. En 2001, une ONG française de la région de l’estuaire de la Loire, Transmad Développement, s’engage dans un programme d’appui à la perpétuation de la goélette sur la côte Ouest malgache. Supervisé par l’entreprise « Boutre en train » de Frédéric Macquet et s’intégrant dans tout un ensemble comprenant la Coopération française, le WWF, le ministère malgache de l’Environnement, des eaux et forêts, et du tourisme, ainsi que l’ANGAP, le projet baptisé « Les ateliers de Joachim » cumule dans ses finalités la modernisation de la filière et la valorisation de la gestion des ressources fournies par la forêt tropicale sèche. L’année 2006, les côtes bretonnes voient arriver une authentique goélette malgache conçue selon les techniques traditionnelles. Le Lovasoa jauge 11 tonneaux et mesure 14 mètres hors tout. Construit à Morondava, entré ensuite en chantier de rafraichissement et d’aménagement interne à Toliara, il part parachever sa mise en conformité en France. Là-bas, une campagne très fournie de navigation l’attend avec une dizaine de ports et une participation remarquée au Festival des Rendez-vous de l’Erdre à Nantes. Que le Lovasoa et ses semblables continuent d’avoir bon vent et belle mer, et que vivent nos goélettes ! Pour très longtemps encore… Destinées - Les faiseurs de rois Du temps de l’Ancienne Alliance, le roi le plus puissant allait régulièrement consulter le prophète qui l’a fait roi, un [caption id="attachment_60526" align="alignright" width="395"] Le pasteur Mailhol, qui prétendait être « désigné », par une prophétie, président
de la République en 2013, est en course pour la magistrature suprême cette année-ci.[/caption] personnage parfois très humble et habitant une cabane au bout d’un chemin de chèvre, pour connaître avec précision l’avis de Dieu sur tel ou tel problème de l’État. Il était même possible que ce prophète soit une prophétesse, comme la plus célèbre d’entre elles, Déborah, dont le Livre a conservé la réplique cinglante à Barac fils d’Abinoah, lequel refusait d’aller sans elle au combat contre Sisra et ses neuf cents chars de fer : « Je t’accompagnerai, mais tu ne tireras aucune gloire de cette expédition, car c’est à une femme que Dieu livrera Sisra ». Ces élus de Dieu ne voulaient pas le pouvoir pour le pouvoir, à l’instar de Samuel qui préféra oindre Saul, dont les pas avaient été conduits à lui par Dieu sous prétexte de la recherche d’un troupeau d’ânes égarés. Aujourd’hui au 21è siècle, il est à croire que beaucoup d’esprits chez les Malgaches en sont restés au temps de Juda et d’Israël, d’abord du côté de ceux qui se croient investis de la mission d’être des intermédiaires entre Dieu et les tenants du pouvoir. Combien de fois la Vierge Marie aurait-elle transmis des messages que l’on disait urgents et de la plus haute importance à l’intention du plus haut dirigeant du pays, là-bas du côté d’Anosivolakely ? Le destinataire final y a toujours opposé la plus condescendante des fins de non-recevoir. Personne ne peut dire aujourd’hui que bien ou mal lui en prit, mais l’Histoire a suivi son cours, laissant au bord de la route ceux qu’elle a choisis d’oublier, du moins jusqu’au prochain tour de roue qui ne saura plus tarder. L’Église Luthérienne, dont on connait la sévérité, s’est quelque peu mise en retrait de ces affaires d’illuminés depuis la disparition de Nenilava. Il n’empêche que le virus a peut-être tellement bien pris que de temps à autre un anonyme sort des rangs avec une mission demeurée inchangée depuis des millénaires : délivrer en mains propres un message divin au plus haut lieu. Ce fut le cas il y a plusieurs années de cela de Landivola, touchée par la Grâce dans sa chambre sous les toits. Ce fut aussi le cas plus récemment d’une diaconesse du Moyen Sud. Son langage et ses propos étaient si tranchés que beaucoup n’hésitèrent pas à voir la main du pouvoir en place derrière le montage. Dieu certainement ne s’est pas laissé avoir. L’Église officielle luthérienne s’est toujours gardée de commenter ces dérapages… incontrôlés de certains de ses ouailles. Il n’empêche que la question peut se poser concernant la quasi-institutionnalisation du pèlerinage au Toby luthérien d’Ankaramalaza pour les dirigeants en place, quand bien même ils seraient d’une autre confession. Nécessité d’une onction divine sine qua non ? Reconnaissance en l’Église Luthérienne de la qualité d’être le dépositaire de cette onction ? Les autres Églises apprécieront. Le fin du fin est à mettre au crédit d’un pasteur « apocalyptique » qui s’est autoproclamé à la fois porteur, objet, et principal destinataire du message. On n’est jamais aussi bien servi que par soi-même. La teneur se résume en une phrase : « Pour des raisons indépendantes de notre volonté, notre rendez-vous de 2013 est reporté en 2018 ». Difficile de faire plus simple ou même plus simpliste… Politique - Mots d’avant, maux d’après, et le réformisme d’Emmanuel Macron [caption id="attachment_60527" align="alignright" width="427"] Pour le Président français, Emmanuel Macron (ici, saluant le président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi),
l’Europe est la meilleure solution pour la France.[/caption] Ne tirez pas sur le politicien, candidat à quoi que ce soit de surcroit, sa position n’est pas toujours facile : obligé de verser dans la surenchère pour se distinguer du peloton - que la lumière soit, mais la lumière se fit tirer les oreilles - condamné à l’opprobre en cas de promesse non tenue - ce qui arrive plus souvent qu’à son tour - cette irrésistible obsession consistant à « parvenir » d’abord et voir « après » est de moins en moins appréciée. Heureusement que quelques uns s’efforcent encore de tenir parole, quitte à ne pas pouvoir tout réaliser, mais après avoir donné la preuve d’avoir, quand même, tant soit peu essayé. Avec sa politique transpartisane, un débauchage officialisé diront les détracteurs, ses audaces et ce qu’il faut bien appeler son « inventivité législative » et son réformisme font que, on l’aime ou on ne l’aime pas, Emmanuel Macron pourrait bien être un de ceux-là. Ne disait-on pas (très tôt) que c’est l’homme « qui agit comme une tornade, qui soulève les idées reçues et les fracasse en les jetant dans le débat public ». Alors qu’il n’était encore que pressenti-candidat, l’homme avait multiplié les interventions à forte connotation d’engagement personnel dans les média. Et il n’a pratiquement plus arrêté. Interview [caption id="attachment_60528" align="alignleft" width="300"] Emmanuel Macron a lancé son mouvement
« En marche » en avril 2016.[/caption] Dans une longue interview accordée en mars 2016 au magazine français L’Express, il décrit en long et en large ce qu’il veut pour la France, depuis la plus petite commune jusqu’à sa place au sein de l’Europe. On le présente alors comme « l’homme qui veut faire bouger l’État, donc la France, donc l’Europe ». Extraits de cette causerie, lue spécialement pour vous : -Le visage qu’aura notre pays dans dix ans se forge aujourd’hui… La promesse à faire à la jeunesse ne consiste pas à lui dire ce qu’elle doit être, ni ce que doit être son pays dans dix ans, mais à lui donner la possibilité de choisir pour elle-même quand elle sera en responsabilité. -La réforme du travail en cours va dans ce sens… Mais il faut la déplier dans sa totalité. Nous devons poursuivre ce mouvement encore plus profondément dans la période qui s’ouvre, et après. -Quelle politique économique ? J’ai toujours exprimé un choix clair en faveur d’un libéralisme économique et politique, avec un socle de solidarité collective, de régulation, et la conviction que le principe de liberté rend plus fort. -Concernant la communauté nationale… Je pense qu’on peut la protéger dans le plein respect des libertés individuelles. Je crois même que la vraie sécurité se construit dans la liberté des individus, sinon vous continuez à produire de la défiance dans la communauté nationale et, ce faisant, vous l’affaiblirez progressivement. -Le « rude et grand effort collectif » cher à Pierre Mendès France est toujours d’actualité… Sauf qu’il suppose une compréhension collective du problème. Je crois pour ma part dans l’intelligence du peuple. Le peuple français est prêt à la réforme profonde, à condition qu’on lui explique où l’on va et qu’on lui rende compte de manière régulière. Notre pays a soif d’engagement. -Redonner le goût du travail ? Oui, parce que la réalité que j’ai mesurée à chacune de mes rencontres et déplacements, c’est que les gens ont envie de travailler, tous, et en particulier les jeunes des quartiers. Quelle réconciliation avec le capital ? Dans notre pays on aime la rente, l’argent qui dort, plutôt que celui qui produit, alors que nous avons besoin justement de plus de prise de risque. On n’aime pas l’enrichissement par le travail et le mérite individuel. Or on ne peut pas avoir une vraie souveraineté industrielle et économique si on n’a pas un capital français. -L’Europe dans dix ans… L’Europe a été fondée sur une triple promesse : éliminer la guerre, faire prospérer l’économie, permettre à tous de circuler librement. Aujourd’hui les gens ont le sentiment qu’elle nous fait souffrir plus qu’elle ne nous apporte. Ma conviction profonde est qu’elle est pourtant notre meilleure solution. Ndlr : pour des raisons bien évidentes de pôles d’intérêt pouvant fluctuer selon le pays du lecteur, nous ne nous sommes pas appesantis dans ces extraits choisis sur les questions relevant trop exclusivement des réalités politico-économiques françaises. Par contre, certaines idées exprimées peuvent sans dommage être transposées dans d’autres pays, dont le nôtre. Les mentions en gras ne concernent pas les questions posées, mais une simple introduction de la question traitée. Rétro pêle-mêle Certains noms sont plus que connus, d’autres plutôt moins. [caption id="attachment_60529" align="alignright" width="300"] Le général Ferdinand Razakarimanana, un personnage atypique.[/caption] Nous sommes en 2004, et Michell Barbaza, un opérateur malgache très performant dans le domaine des BTP, fait honneur au secteur privé de la Grande île en raison de la bonne tenue de sa société EBMA. Cette entreprise est sortie première de l’évaluation effectuée par la prestigieuse BFW-BAV allemande lors d’une mission à Madagascar, alors que l’Alma, ou Asa sy lalana malagasy, ne pointe qu’en dixième position. EBMA a su convaincre les Allemands par sa rigueur et son abattage, des qualités bien… germaniques. Du côté des ambassades, Jean-François Bijon, conseiller économique et commercial à l’Ambassade de France, a la réputation d’être l’un des hommes les mieux informés sur la situation économique et sociale de Madagascar, sur la même ligne que le Représentant de la Banque mondiale. On ajoutera qu’il est l’inspirateur des rencontres économiques franco-malgaches de cette même année à Paris sous l’égide d’UbiFrance. L’univers politique malgache bouillonne toujours, et beaucoup s’interrogent sur le mystère de certaines nominations. C’est le cas de celle du général Ferdinand Razakarimanana propulsé à la tête de la province d’Antananarivo. Personnage atypique, volontiers bourru et frondeur, il lui arrive d’embarquer tout son staff loin des séminaires et autres pertes de temps. Militaire jusqu’au bout des ongles, il ne rechigne pas de dormir sous la tente pendant ses tournées. Quand la Banque va, il est difficile de ne pas avoir à l’esprit des géants comme Gaston Ramenason, président de la BMOI. Cette filiale de la BNP a affiché un bénéfice net d’exploitation de plus de 50 milliards Fmg pour l’exercice 2003, ce qui n’est pas négligeable au regard de la conjoncture du moment. Parallèlement, Ramenason est le N°1 du Groupement des Entreprises de Madagascar (GEM), où il a la réputation de ne jamais éviter les questions qui fâchent. Les Karana ont aussi leurs figures emblématiques : Mme Salma Hassanaly, qui fut le porte-parole de la communauté bohra lors des dialogues présidentiels d’Ambohitsorohitra, est souvent mise aux premières places des personnalités karana marquantes, au même titre qu’un Ylias Akbaraly. Les deux ont d’ailleurs été formés dans de prestigieuses Universités notamment françaises et américaines, Mme Salma Hassanaly ayant pour sa part complété son cursus au sein de cabinets ministériels français et dans l’univers des télécommunications. Dernier mais non le moindre, Dukuzumuremy Pasteur mérite d’être spécialement cité parmi les meilleurs donateurs auprès du Comité National de Secours. Cet industriel est un rwandais d’origine, qui a créé en 1997 le savon connu sous l’étiquette « Savony Salama ». À côté du savon, sa société produit aussi des articles cosmétiques et d’entretien. Textes : Tom Andriamanoro Photos : Archives de L’Express de Madagascar - AFP    
Plus récente Plus ancienne