Intransmissible histoire ?


Le mois de mars n’est pas uniquement celui des droits des femmes. Il est aussi celui de la commémoration de l’Insurrection de 1947. Chaque année, la date fatidique du 29 mars voit l’organisation de quelques manifestations et expositions autour des tristes évènements dont aujourd’hui, la totalité des archives n’est pas encore divulguée. Un contexte qui porte à réfléchir sur l’importance et la manière de transmettre notre passé aux plus jeunes, de moins en moins intéressés à l’histoire, au patrimoine et à la connaissance ancrée dans la mémoire collective. Les écoles font leurs parts de travail d’éducation des bases historiques, mais apparemment, elles ne suffisent plus à capter l’attention. Peu de livres pour connaître l’histoire pour un public qui, à la base, n’est déjà pas habitué à la lecture. Peu d’émissions historiques, que ce soit à la radio ou à la télévision pour un jeune public et très peu d’activités pour comprendre et raisonner autour de l’histoire de Madagascar et de son patrimoine culturel et historique. C’est un élément majeur de l’identité et de la connaissance de soi qui reste enclavé par le peu de moyens pour le véhiculer, l’enraciner et le rendre captivant pour la jeunesse. Les commémorations comme celle du 29 mars restent des dates ponctuelles. Aujourd’hui, à part quelques rares expositions et quelques musées locaux dont les activités ne sont pas toujours médiatisées et pas forcément pensées pour captiver l’attention d’un jeune public, il n’existe pas vraiment de concepts ou de lieux qui permettent de s’abreuver d’histoire d’une manière ludique ou enthousiasmante pour les jeunes. Les exemples étrangers que l’on pourrait adapter aux attentes d’un public malgache ne manquent pas, mais apparemment l’histoire elle-même ne semble pas être une idée particulièrement vendeuse pour une émission audiovisuelle. La question de base elle-même n’a pas l’air de vraiment intéresser : comment et pourquoi transmettre l’histoire et le passé aux héritiers ? Alors qu’en 2005, le président français Chirac en visite à Madagascar avait évoqué le «caractère inacceptable des répressions engendrées par les dérives du système colonial » et en précisant qu’il « s’associe avec respect à l'hommage qu'ils méritent (*)». Mais son homologue malgache avait préféré faire l’impasse sur cette occasion de réparer les gâchis de l’histoire, sortant à son tour une phrase qui marquera les esprits : de toute façon, il n’était pas encore né, en 1947. Une anecdote insolite mais qui reflète bien le peu de cas que l’on fait du passé commun et du souvenir. Si l’histoire est un éternel recommencement, notre peu d’enthousiasme à le connaître n’est-il finalement pas à la source de notre enlisement ? Et comme la population malgache est très jeune puisque la plupart d’entre nous ont moins de 70 ans et n’était pas né en 1947…Imaginons que la mémoire collective s’éteigne par excès de jeunesse… (*) Le Monde, du 27 mars 2007. Par Mialisoa Randriamampianina
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