Une histoire de résistance


Cette semaine, un projet un peu particulier débute dans la capitale malgache : le Learning Initiative Aiming at Nonviolent Actions (LIANA), une formation pratique sur la résistance civile non-violente. Près de 90 personnes se sont inscrites pour la seule ville d’Antananarivo afin d’expérimenter cette initiative conjointe de Wake Up Madagascar, Liberty 32, le programme Wyld et l’International Center for Non-Violent Conflict : s’initier au concept d’une résistance civile pacifique. L’idée s’inspire de bien d’expériences antérieures, connues dans plusieurs pays du globe à différentes étapes de leurs histoires : l’Inde, l’Afrique du Sud, le Chili, la Serbie, etc. Le concept n’est donc pas nouveau mais reste innovant pour un Madagascar de 2016, un cru de violences, et qui aspire à de meilleures conditions de vie. L’affaire Soamahamanina, qui a eu ses échos dans le monde, est un exemple de cette difficulté pour la population d’aboutir à une écoute pacifique de leurs attentes. De prime abord, l’initiative du programme LIANA fait lever quelques sourcils inquiets : on associe souvent l’idée de la manifestation publique et de l’activisme à des essais de déstabilisation de l’Administration. On accole ces actions publiques à la violence, la « prise de ministères », voire les coups d’État comme notre passé nous le démontre. En règle générale, les manifestants se heurtent au silence de l’Administration malgache ou à la répression musclée des forces de l’ordre, à l’origine de plus de frustrations, de plus de colères et de plus de divisions au sein de la société. Quand le dialogue ne s’installe pas et que les attentes restent vaines, quelle solution pour les citoyens ? Le programme veut combattre les obstacles autour des actions non-violentes, considérées comme inefficaces, trop lentes et par conséquent, difficilement fédératrices. À travers la formation itinérante, 198 façons différentes sont proposée pour interpeller les dirigeants en empruntant une forme d’expression pacifique, avec, cependant, un appel à la prise de conscience des manifestants quant à la nécessité d’une implication consciente, engagée et constante. C’est donc tout un apprentissage que le projet voudrait initier, partager et vulgariser avec l’objectif de rendre la résistance non-violente, une forme inéluctable d’interpellation et de pression. Il y a de quoi faire, sur Madagascar : corruptions, trafics, dépenses publiques, éducation nationale, santé publique, liberté d’expression, droit à l’information, autant de sujets qui demandent une action citoyenne. Une manière de remettre le citoyen au cœur des affaires nationales et de rappeler à l’Admi­nistration son obligation de redevabilité. Nous avons expérimenté le laissez-faire, avec ses conséquences ; puis la violence, avec ses résultats et ses plaies qui cicatrisent mal. Au point où nous en sommes, pratiquons ce que nous prêchons depuis cinquante ans : firaisankina no hery. Par Mialisoa Randriamampianina
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