Professeur Jonah Ratsimbazafy - « Un reboisement intensif demande une préparation »


L’état fait l’annonce d’une reforestation de 40 000 ha par an pour recouvrir l’île de forêt. Des questions sont à expliciter, propose un spécialiste en environnement. Flou. L’effet d’annonce a marqué mais n’a pas éclairci les opinions. Le conseil des ministres du 27 février a souligné que Madagascar sera (re)couverte de forêt. La décision est motivée par le constat de la déforestation grandissante enregistrée depuis les vingt dernières années. 50 000 ha de forêt disparaissent chaque année selon les derniers chiffres du ministère de l’Environnement et du développement durable. 44% des 13 millions d’ha de fôrêt que compte le pays ont été rayés de la carte et la vitesse de disparition est plus qu’inquiétante depuis 2005. L’initiative a démarré avec le président de la République, Andry Rajoelina, samedi dernier à Moramanga. Toutefois, la stratégie de reboisement à grande échelle n’est pas assez explicite, notamment pour les spécialistes de l’environnement. «Le reboisement ne se pratique pas à toute période de l’année mais seulement pendant la saison pluvieuse, soit entre novembre et mars. Nous n’avons donc que ce mois de mars pour reboiser, cette année, si on veut atteindre un taux de réussite satisfaisant» avance le professeur Jonah Ratsimbazafy, environnementaliste et actuellement président du Groupe d'Etude et de Recherche sur les Primates de Madagascar(GERP) et vice-président de l’International Union for Conservation Nature (IUCN) section Madagascar. Par ailleurs, faudra-t-il préciser les espèces à planter pour chaque localité spécifique? « Les terrains à reboiser de plants d’espèces d’eucalyptus et de pin, par exemple, sont condamnés. L’eucalyptus est un grand buveur d’eau. Le sol devenant ainsi dur ne laisse aucune chance aux autres plants. Ces espèces sont bonnes pour une conservation de sol mais si c’est pour créer une forêt primaire, non » détaille le spécialiste. Suivi Création, reforestation, restauration ou reboisement ? Le choix des espèces à introduire est ainsi à bien équilibrer car ne permettrait pas toujours à la faune d’y habiter convenablement. « Les lémuriens sont des agents pollinisateurs de fleurs et de bons moyens de dispersion de graines, et ce depuis des millions d’années. Seulement, ces animaux n’évoluent pas dans n’importe quelle forêt » ajoute le professeur. Les plantes endémiques et autochtones n’atteindront pas plus de 1.50m en cinq ans. Aussi, ne peut-on pas tout de suite parler de « forêt ». « La question de suivi des actions de reforestation et de régénération d’espèces en voie de disparition est aussi importante » explique encore le professeur Jonah Ratsimbazafy. L’espérance de vie d’un plant dépend du suivi que l’on se donne la peine de suivre un, trois, neuf mois suivant sa mise en terre.
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