Liasse et liesse


Les lois électorales ont été votées par la majorité des députés, hier à Tsimbazaza. Mauvaises ou pas, corruption ou pas, il faudra faire avec et essayer de gagner à la régulière. Eh oui, Marc Ravalomanana avait montré que c’était possible en l’emportant nettement face à l’ogre Ratsiraka en 2001. Aucune stratégie, aucun subterfuge ne peuvent résister à un raz-de-marée. Inutile donc de s’apitoyer sur des lois qui ont été votées selon les règles démocratiques en vigueur à Tsimbazaza. La corruption, les froissements des liasses, la liesse du vainqueur constituent des rituels bien ancrés à Tsimbazaza. Seuls les acteurs changent souvent de camp selon l’offre. Que des députés qui avaient voté massivement la déchéance du Président de la République en mai 2015 avec exactement la même méthode crient aujourd’hui au scandale, a de quoi surprendre. À l’époque, on se félicitait de la solidarité parlementaire dans la tentative d’écarter le Président qui a été sauvé par la Haute cour constitutionnelle. Une députée a été, par la suite, interceptée par les forces de l’ordre avec des cartons bourrés de billets de banque dans le coffre de sa voiture. La corruption n’a jamais scandalisé, sauf maintenant, quand la participation de certaines personnes à la présidentielle est menacée. Aujourd’hui, ils sont victimes du retour de la manivelle, qui règle l’alternance démocratique et reçoivent une tarte en pleine figure. Entre temps, beaucoup de députés se sont rangés à la cause du Président, désertant leur parti d’origine. Un ennemi commun, des intérêts convergents ont poussé des députés à oublier leurs rivalités légendaires. Tout ce qu’on pratique quand on est dans le pouvoir devient scandaleux quand on est en dehors. Et ainsi de suite. Et on se félicite du patriotisme des parlementaires frondeurs. L’amnésie rime avec amnistie au point que celui qui était le champion de l’interdiction d’entrée sur le territoire à des ressortissants nationaux crie à la dictature lorsqu’on lui inflige la même mesure. Rien n’est nouveau à Tsimbazaza. La corruption, les liasses et la liesse, c’est le tarif habituel. Pourquoi s’indigner maintenant alors qu’on a tout toléré jusqu’ici ? Il a toujours été ainsi pour faire voter la loi de finances, pour faire avorter une motion de censure...Cela n’a jamais fait de vague ni à l’Assemblée nationale ni au sein de l’opinion. Le vin est tiré, ou plutôt le champagne, il faut le boire. Par Sylvain Ranjalahy
Plus récente Plus ancienne