Revoir Tana...


Il semble de plus en plus difficile de redécouvrir Antananarivo et ses environs avec un œil neuf, dès lors qu'on a vécu ici assez longtemps. Assez longtemps, pour avoir vu le visage décharné de la capitale, le peu de cas que l'on fait de la transmission du patrimoine tant par la connaissance que par l'appropriation. Assez longtemps, pour constater que la misère se traduit souvent par une dégrada­tion des biens et du paysage communs. Dans cet esprit morose, on apprécie ces entités qui "aident" à redonner du sens à l'idée de vivre à Antananarivo. Un bravo à l'Ortana qui organise régulièrement des randonnées autour de l'Imerina, en faisant l'effort d'apporter un regard neuf et attrayant, que l'on n'a plus forcément sur les lieux et les choses. Le travail de cet office, en tout cas, pour la simple citoyenne que je suis, ressemble à une résistance contre la morosité d'une région, malgré plusieurs siècles d'histoire. C'est presque réinventer les circuits, revoir le panorama historique et la redécouverte de lieux aux secrets inattendus : un effort de redécouverte qui n'est pas du luxe par les temps qui courent. Celui qui a l'occasion de faire un tour de la ville constaterait à quel point elle manque cruellement de «lieux enchanteurs»: pas un jardin public fleuri, très peu de repères architecturales - les rares rescapées sont les demeures où les générations héritières n'ont pas pensé à accoler des dépendances -, pas vraiment de parc public où l'on peut, d'une manière sécurisée et hygiénique, laisser ses enfants jouer, pas de jolies petites rues romantiques. Les rares stèles sont dégradées, les fleurs et décorations de lieux publics sont escamotées et la moindre parcelle libre est envahie d'étals de friperies. Toute cette tendance au laisser-aller contamine les petites localités qui, autrefois, faisaient le charme du vieil Imerina. Dans une perspective d'amélioration du flux touristique, Antananarivo et Anala­manga gagneraient à se refaire peau neuve, pour ne plus être l'éternel escale avant de rejoindre d'autres destinations sur Madagascar. Peut-être par des gestes simples, comme nettoyer devant sa porte - ou du moins, limiter ses déchets inutiles-, ce qui est déjà une habitude positive, pourrions-nous au moins redéfinir les traits de notre capitale, encore faut-il que nous acceptions de faire ce si petit sacrifice quotidien. La propreté n'inspire-t-elle pas l'innovation ? En attendant des jours meilleurs - qui ne viendront que si on s'en donne la peine, car la volonté individuelle ne l'emportera pas sur l'immobilisme collectif, pas encore -, on ne remercie jamais assez ces gens qui font du mieux qu'ils peuvent pour remonter le moral de la troupe. Merci Ortana d'organiser des moments où l'on peut encore croire qu'il est possible de redorer les blasons d'Analamanga. Et un jour, revoir Tana, sous son vrai et beau visage. Par Mialisoa Randriamampianina
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