Du propre !


Voici, sans doute, ce qui s'ajoute à des dizaines d'autres appels à l'urgence d'une prise en main devant ces cas de peste qui deviennent inquiétants. La peste, et tous ces maux liés à la saleté dont nous héritons parce que nous ne prenons jamais l'hygiène et la salubrité au sérieux. Nous ne prenons pas au sérieux les petits détails d'une vie quotidienne saine, comme se laver les mains, se moucher, nettoyer la maison, ne pas uriner ou déféquer en plein air. Des gestes banals, ordinaires, qui auraient dû être systématiques mais qui ne sont que péniblement, voire jamais acquis. On n'y pense pas, parce qu'on ne mesure pas les conséquences d'un acte que l'on pense anodin. Mais multipliés des dizaines de fois par des milliers de personnes chaque jour, ce sont des gestes anodins qui deviennent un mode de vie. L'emprise des habitudes est telle qu'il n'est pas rare d'associer la propreté au snobisme et les contraintes liées au nettoyage comme étant des gestes pour ceux qui ont, soit le temps, soit les moyens. On considère par exemple que si vous entrez dans une gargote ou un petit resto pour votre déjeuner, vous devez nécessairement accepter de manger dans un lieu un peu sombre, au parquet poussiéreux, aux nappes en toile cirée collante et où les cuisines restent d'une netteté très contestable. Si vous vous plaignez, c'est que vous êtes « un snob qui se croit au Carlton ». On accepte, avec une certaine indulgence un peu affectueuse, que ces conditions hygiéniques déplorables font partie du «charme des lieux» et du «cachet local», au même titre que les maisons traditionnelles de la Haute-Ville ou le Hiragasy. Autre exemple : on ne fait pas trop cas d’une mère de famille qui décide de jeter les eaux usées de sa cuisine par-dessus sa fenêtre en maculant la ruelle de riz, de légumes et de liquides huileux qui vont attirer rats et mouches. Si vous n'êtes pas content, c'est que vous êtes «un fayot» qui n'a aucune idée de la réalité d'une maman ordinaire qui n'a pas que çà à faire. Ou bien, lorsqu'une personne décide d'uriner en plein air. Comment ferait-elle autrement, si les cabinets publics sont payants, vous dira-t-on ? Voilà qui va justifier le fait de faire ses besoins en public : le faire en privé coûte de l'argent. Oui, mais sans doute pas plus cher que les épidémies que nous devons gérer dans l'urgence, parce que nous avons accepté de renoncer aux petits efforts de propreté quotidienne. Vous aurez compris que pour réapprendre les bases d'une propreté ordinaire, il va falloir commencer par couper l'herbe sous le pieds de quelques habitudes très populistes. Et entamer une campagne d'hygiène agressive et contraignante. On gagnerait tellement de temps, d'argents et de sérénité rien qu'en faisant l'effort quotidien et simple de garder propres ne serait-ce que nos rues et le devant de nos maisons. Selon la presse, une cellule de veille est mise en place par la Primature pour «endiguer la propa­gation de la peste» et que des «dispositions particulières» ont été prises pour que le service autonome de maintenance de la ville d'Antananarivo (Samva) puisse collecter quotidiennement les déchets de la capitale. On aurait pu prévoir que l'amoncellement des ordures finiraient de toute façon par engendrer des conséquences catastro­phiques , mais c'est toujours bien d'avoir une réaction. Puis, un de ces jours, mais le plus tôt serait le mieux, solutionner une bonne fois pour toutes l'assainissement et la salubrité des grandes villes, à commencer par la capitale. Avant qu'une autre déferlante pesteuse ne nous explose en pleine face, et à ce moment là, on ne l'aura pas volé. Par Mialisoa Randriamampianina
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